Balade dans la galaxie Beastie Boys

Le 11 mai 2011

Le 2 mai, le très attendu nouvel album des Beastie Boys, "Hot Sauce Comittee pt.2" est sorti. Pour l'occasion, nous vous proposons de replonger dans la galaxie du trio New Yorkais.

Hot Sauce Committee part 2, le nouvel album des Beastie Boys, est enfin sorti. Le groupe avait plusieurs fois reporté la sortie de l’album. Après une sortie déjà décalée en 2009 pour cause de Crabe qui s’invitait dans la gorge d’Adam Yauch, alias MCA, le groupe refaisait le coup en 2010. « Pas avant 2011 les amis ! ». Promesse finalement tenue avec un disque qui réjouit les fans. C’est l’occasion pour OWNImusic de republier la petite balade dans la galaxie Beastie Boys, balade guidée par Gwen de Centrifugue. Un univers gigantesque, aux astres multiples et empli d’univers parallèles. Décollage.

Les grands champs gravitationnels

Débutons notre périple cosmique par ceux qui ont modelé cette galaxie : les inspirateurs et les producteurs.

Lee Scratch Perry

Le producteur incontournable dans l’histoire du reagge et du dub. Celui-ci fit une apparition remarquée sur Hello Nasty avec le morceau Dr Lee PhD. Une association débutée lors d’une première partie des Beastie assurée par Lee Perry, à l’occasion d’une tournée au Japon en 1996. Mais l’influence est plus ancienne et remonte à l’EP Cooky Puss en 1983, qui comportait les morceaux dub-reggae Beastie Revolution et Bonus Batter Edit : et l’on retrouve également un sample de Dub Revolution sur Ill Communication. Une référence évidente aux B-sides, ces reprises instrumentales créées par Lee Perry et qui donneront naissance au dub.

Rick Rubin

« Le plus grand producteur de ces 20 dernières années » pour Corey Moss sur le site de MTV. Lister le nombre de groupes qui ont travaillé avec lui est une gageure (On citera rapidement Slayer, Metallica, LL Cool J et Public Enemy pour la forme). Mais son influence sur les Beastie est indéniable. C’est en effet rien moins que le producteur et le coauteur de Licensed to Ill en 1986.

Licensed to Ill. Premier album (LP) des Beastie Boys. Premier album de rap à entrer dans le classement Billboard 200. Vendu à plus de 9 millions d’exemplaires. Décollage immédiat vers la célébrité.

Si l’album nous balance des bombes hip-hop, le fan de metal qu’est Rick Rubin donne aux Beastie Boys l’occasion de nous délivrer Fight for Your Right to Party et No sleep till Brooklyn, avec le solo furieux de Kerry King, guitariste de Slayer. Deux morceaux de rap-metal qui n’ont pas pris une ride après plus de 20 ans.

Les Dust Brothers

En 1988, la rupture avec Dej Jam, le label créé par Rick Rubin1 , est consommée. En cause des problèmes de royalties mais également de tempérament. Car la lourdeur musicale du bonhomme déteint un peu sur son caractère. Et les Beastie, passés maitres en conneries diverses et variées, n’ont pas l’intention de devenir juste cons.

Direction donc Los Angeles où ils rencontrent les Dust Brothers. Pas forcement connus du grand public, ils ont pourtant lancé la carrière de Beck (L’album Odelay et son single Loser, c’est eux) et ont composé la BO de Fight Club. Mais dans le coin de galaxie qui nous intéresse, ils sont à l’origine d’un des chefs-d’oeuvre des Beastie (et même pour le fan transi que je suis, le mot n’est pas usurpé) : Paul’s Boutique.

Les samples incalculables qui composent l’album étaient destinés à l’origine à leur usage personnel. Mais les Dust Brothers ont eut le bon goût de laisser les Beastie poser leur voix et leurs instruments dessus (Et problablement divers produits au passage…). Grand bien leur en a pris.

La scène hardcore

Cela va finir par devenir une antienne sur ce blog mais il est toujours bon de rappeler que nos trois rappeurs de New York ont commencé par du punk-hardcore bien énervé. Comme nous l’avions vu ailleurs, les rastas furieux de Bad Brains, virés en 79 de Washington DC, y ont changé la face de la scène hardcore naissante.

Et celle du bassiste Adam Yauch, futur tiers des Beastie Boys, qui ira les voir jouer plus de 50 fois, comme il le confiait en 1994 dans le magazine Guitar World. Et outre les initiales communes du groupe en guise d’hommage, cette influence s’est manifestée à plusieurs reprises. Brouillés, les membres de Bad Brains se reformeront ainsi en 1995, à l’occasion d’une tournée des Beastie Boys2 . Et Yauch produira Build a Nation en 2007, leur dernier album en date. Edit : Rajoutons enfin l’utilisation par les Beastie de samples de The Big Take Over et Supertouch / Shift It sur, respectivement, Pass The Mic et The Maestro.
Deux autres groupes à citer également : Black Flag (vu ici ou là), autre grosse influence d’Adam Yauch, et Reagan Youth3 , groupe new yorkais ayant débuté en même temps qu’eux.

Les étoiles filantes

Des passages souvent fugaces. Mais ils ont tous permis à la galaxie Beastie d’entrer en expansion.

Madonna

Ca fait un peu étrange de voir ce nom écrit par ici. Moi même je m’en étonne. Pourtant en 1985, le groupe enregistre le single She’s on it avec le tout jeune Rick Rubin. Un carton qui les amène sur la tournée Like a Virgin. Si l’on en garde peu de choses à part une photo (voir plus haut), la légende voudrait qu’un des Beastie y soit passé avec la Madonne dans un placard… Ah, la jeunesse.

Kim Gordon

Restons chez les filles avec la bassiste de Sonic Youth. Outre le fait que Mike D lui ait donné un coup de pouce pour lancer un magasin de vêtements (X large), celle-ci fera une apparition pour un morceau lors de la tournée Tibetan Freedom. De quoi faire lever le sourcil des fans de scène indé.

Spike Jonze

Canonball des Breeders, Electrolite de REM, Da Funk de Daft Punk, c’est lui. Un sympathique CV. Et de la même manière que Rick Rubin, il va offrir parmi les meilleurs clips des Beastie. Sabotage en tête bien sûr, mais n’oublions pas Sure shot (Le morceau qui a fait découvrir le groupe à votre serviteur).
Beastie Boys – Sure Shot

Fatboy Slim

1998. Sortie d’Hello Nasty. Une incroyable variété de styles musicaux s’y entremêlent. Reggae, ballade, easy listening, electro et hip hop. De quoi en décontenancer certains. C’est la même année que sort You’ve Come a Long Way Baby, l’album qui va lancer la carrière de Fatboy Slim auprès du grand public. Les deux entités se rencontrent et accouchent d’un remix de Body Movin, si apprécié par le trio qu’il remplacera l’original pour le clip vidéo4

Q-Tip

On terminera cette section par une autre collaboration unique. Celle de Q Tip du groupe Tribe Called Quest sur le morceau Get it Together, en 1994. Outre la qualité évidente de la chanson, elle permet aux Beastie de rester, malgré leurs succès, profondement ancrés dans la culture hip hop.

Les satellites

Adam Yauch, Mike D et Adrock, ces trois planètes massives ne doivent pas occulter les satellites, d’apparence certes plus réduite, mais tout aussi majestueux.

Eric Bobo

Sans Eric Bobo, pas de percus sur Ill Communication et Hello Nasty. Ca sonnerait tout de suite moins bien. Il faut dire qu’avec un père à l’origine du latin jazz et pote à Tito Puente, cela aide pour apprendre la musique. Pour plus d’infos je vous conseille d’allez faire un tour sur le site Latin Rapper pour y lire une interview du monsieur.

Après avoir gravité autour des Beastie, Eric Bobo changera d’orbite dans les années 90 pour se rejoindre Cypress Hill. Sympathique coin de l’univers au demeurant.

Alfredo Ortiz

Remplaçant Eric Bobo aux percus, Alfredo Ortiz est du genre astre itinérant. Pour avoir un aperçu de ses déplacements, direction l’article publié sur l’excellent site Mic to Mic. On rajoutera pour l’anecdote que le sieur Ortiz offre ses talents de percussionniste à Tenacious D (autre plus grand groupe du monde, mais dans la catégorie rock) sur leur album éponyme.

Mario Caldato Jr

Si Paul’s Boutique est si génial c’est, comme nous l’avons vu dans le post précédent, grâce aux Dust Brothers. Mais également à cet homme, qui opéra en tant qu’ingénieur du son.

En plus de jouer du clavier et des percus dans les groupes Soul Stick, Wake, Phaze et Phaze II, de produire ou d’offrir ses oreilles aiguisées à moults artistes, le bonhomme aura également le temps de produire l’album Hello Nasty et de s’assurer de la qualité du son lors des tournées des Beastie. La légende urbaine voudrait que cet homme trouve le temps de dormir. Peu crédible.

Deux liens à conseiller : une interview (format PDF) en provenance du site Make Shift Studio et une autre lisible sur le site Sound and Colours.

Money Mark

Le satellite qui se retrouve là un peu par hasard. Money Mark, alias Mark Ramos Nishita, fut en effet répéré par ses dons de charpentier, alors que les Beastie Boys résidaient au G-Spot, leur QG à Los Angeles. Aussi doué avec le bois qu’avec les touches de piano, et accessoirement ami de Mario Caldato, il collaborera aux albums Check Your Head et Ill Communication.

Assez discret, vous le connaissez certainement pour un autre morceau :

Et oui, le clavier au début, c’est lui.

Money Mark, en plus de jouer dans le Omar Rodriguez Lopez Quintet (projet du guitariste de Mars Volta) et dans Banyan (groupe de Stephen Perkins – Jane’s Addiction, Porno for Pyros-), nous pond de temps à autres des albums en solo. Ambiances naïves et confortables au programme, mais aussi morceaux délicieusement groovy. Votre serviteur n’a point eu le temps d’écouter l’ensemble de son oeuvre, mais l’album Change is Coming est hautement recommandable.

mmandable.

- Biz Markie

Biz Markie

Un astre resté un peu trop dans l’ombre. Débutant dans les années 80 comme beatboxer (à voir à ce propos un extrait avec Roxanne Chanté en 1986), Biz Markie, doté d’un humour ravageur, va collaborer à plusieurs reprises avec les Beastie Boys (sur les albums Check Your Head, Ill Communication et Hello Nasty) et même se fendre d’une reprise anthologique de Benny and the Jets d’Elton John (disponible sur la compilation The Sounds of Science) :

Repéré en 1989 grâce à son tube Just a Friend, sa carrière solo ne décollera pourtant pas. Biz Markie s’est en effet retrouvé au coeur d’un des grands procès qui a modifié la scène hip-hop, celui des samples. Lors de la sortie en 1991 chez Warner de son album I Need a Haircut, le musicien folk Gilbert O’Sullivan décide de poursuivre le label pour avoir utilisé sans autorisation un sample de sa chanson Alone Again (Naturally).

Suite à ce procès, l’album de Biz Markie sera retiré de la vente. Et les maisons de production devront clarifier légalement, auprès de leurs créateurs originaux, l’utilisation de chaque sample. Ce que fera avec humour Biz Markie avec son album suivant, All samples cleared !. Mais sa carrière musicale en solo est définitivement amochée.

Heureusement celui-ci continue sa route, notamment à la télévision dans l’émission In Living Color des frères Wayans (où Jim Carrey fit ses premiers pas télévisuels). On le retrouvera également en animateur d’une radio hip-hop dans le jeu GTA San Andreas, et il se fendra même d’un morceau avec DJ Yoda sur l’album The Amazing Adventures of DJ Yoda, Breakfast Cereal.

Edit : le morceau n’est plus dispo sur Youtube mais vous pouvez l’écouter sur Deezer

Les anneaux en vinyle

Que seraient trois MC sans leur DJ ? Ou plutot leurs DJs. Premier en date, le producteur Rick Rubin qui officiera sur la tournée avec Madonna. Il sera suivi de Dr Dre (à ne pas confondre avec le fondateur de Death Row Records et acolyte entre autres d’Eminem) Edit : Vous pouvez trouver des mixtapes de Dr Dre (au vu des morceaux, je pense qu’il s’agit du MC des Beastie) sur le blog Tha Original Mixtapes & Dj’s. Peu connu du public, Dr Dre sera pourtant, via son émission consacrée au rap sur MTV, pour beaucoup dans la reconnaissance des Beastie Boys.

Deux DJs sortent malgré tout du lot : DJ Hurricane et Mix Master Mike. Le premier a débuté dans le sillage de Run DMC. Et c’est lors d’une tournée commune en 1986, le Raising Hell, que DJ Hurricane rejoint les Beastie Boys, en remplacement de Dr Dre, lassé de la vie sur la route.

Hurricane travaillera avec les Beastie jusqu’en 1997 et la venue du seul et unique : Mix Master Mike. Trustant les titres de champions du monde des DJ avec son comparse Qbert, tout amateur des Beastie connait désormais la drolatique intro du clip Three MC and one DJ. Et une seule conclusion possible : ce mec est brillant. Et innovateur (En plus d’avoir Will Ferrell pour faire son intro… Y en a qui cumulent, j’vous dis).

Pour ceux qui en douteraient, réécoutez Hello Nasty (cf l’intro à la pédale wa wa sur la version album de Three MC ’s and one DJ) et To the 5 Boroughs. Mais je vous conseille également de vous pencher sur son travail solo, en particulier l’EP Eye of the Cyklops.

Et pour tous les amoureux des DJs, un documentaire à voir : Scratch (Edit : ou vous pouvez regardez quelques vidéos ici )

Glen Friedman, l’astronome

Nous en avions parlé vite fait ici, aussi je serai bref. Juste pour rappeler que la collaboration entre Friedman et les Beastie remonte aux tous premiers albums publiés chez Def Jam et qu’il est à l’origine d’un paquet de photos mythiques du groupe, dont la plus connue est peut-être celle de Check Your Head, et son noir et blanc classieux.

Run DMC, la planète jumelle

Si l’on se doit de citer Public Enemy dans ce papier (via Party for Your Right to Fight, leur clin d’oeil à Fight for Your Right to Party des Beastie), les liaisons les plus fortes demeurent celles avec Run DMC. Nous les avions déja croisés dans le post précédent, mais comme une piqûre de rappel fait toujours du bien :
Run DMC – It’s Tricky

Run DMC sera souvent cité comme pendant afro-américain des Beastie. Quitte à parfois s’en servir pour rabaisser les Beastie Boys, qualifiés à leurs débuts de pâle copie. La question ne se posait pourtant pas pour les deux groupes. Tournée commune, même DJ, même croisement entre metal et rap (avec le célèbre Walk this Way en duo avec Aerosmith). La chanson Slow and Low de Beastie était de plus à l’origine un morceau de Run DMC. Et pour achever de vous convaincre, autant regarder ces extraits :

Allez, remuez bien votre popotin avec tout ca. Et rendez-vous demain, direction les mondes parallèles !


Article publié initialement sur Centrifugue en 2 parties

Photo montage à partir des photos FlickR CC : PaternitéPas d'utilisation commercialePartage selon les Conditions Initiales MrDevlar et PaternitéPas d'utilisation commercialePartage selon les Conditions Initiales jaygoldman et Loguy

  1. Le label fut créé en 1984 avec Russel Simon. A lire une interview de Bill Adler, qui travailla pour ce label, sur Brain Magazine []
  2. Le chanteur HR a malheureusement eu l’idée de se refoutre sur la gueule avec ses potes, annulant ainsi leur concert et leur participation au reste de la tournée. []
  3. Un article intéressant sur le groupe sur le blog New Wave Hooker []
  4. Clip qui rend au passage un joli hommage au Danger : Diabolik ! de Mario Bava []

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