OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 La police contre les écoutes http://owni.fr/2012/12/06/la-police-contre-les-ecoutes/ http://owni.fr/2012/12/06/la-police-contre-les-ecoutes/#comments Thu, 06 Dec 2012 16:07:41 +0000 Pierre Alonso http://owni.fr/?p=127023

“C’est du délire, du délire !” Après les magistrats, les policiers haussent à nouveau le ton contre le futur système d’écoutes judiciaires. Dans leur ligne de mire : la main mise d’une entreprise privée, le géant Thales, sur des données extrêmement sensibles centralisées en un lieu.

La plateforme nationale des interceptions judiciaires (Pnij de son petit nom) devrait entrer en phase de test au premier semestre 2013, après plus de six ans dans des cartons scellés confidentiel-défense. Il est piloté par la délégation aux interceptions judiciaires, une structure du ministère de la Justice.

A l’Intérieur, tout le monde ne voit pas d’un bon œil une telle intrusion de la place Vendôme dans les enquêtes, comme l’a raconté Le Canard Enchaîné. Le géant français Thales a remporté l’appel d’offre en 2010, ce que les actuels prestataires ont contesté devant le tribunal administratif. Sans succès.

Dans le secret des écoutes

Dans le secret des écoutes

Une plateforme pour centraliser les écoutes, scruter le trafic Internet... Ce projet entouré de secret verra bientôt le ...

Des “réserves”

Dans quelques mois, le lien entre les officiers de police judiciaire et les opérateurs sera automatisé au sein de la PNIJ [Voir notre infographie]. Une réforme qui rassure fournisseurs d’accès à Internet et opérateurs de téléphonie, sujets à de fausses demandes de réquisitions. Mais la PNIJ stockera aussi le contenu des réquisitions. Impensables de confier des données aussi sensibles à une entreprise privée estiment de concert policiers et responsables nationaux de la cybersécurité.

Dans un courrier au secrétaire général du ministère de la justice daté de décembre 2011 qu’Owni a consulté, le directeur général de la police national d’alors, Frédéric Péchenard, se faisait l’écho de ces critiques. M. Péchenard écrit :

L’ANSSI [L’agence nationale en charge de la cybersécurite, NDLR] a émis des réserves sur l’infogérance et l’hébergement de la PNIJ par la société Thales.

Cette “fragilité” est aussi soulignée par “les services utilisateurs”, les policiers donc. Ils “s’interrogent sur la confidentialité du site d’Elancourt proposé par Thales et sur les mesures de sécurité qui seront prises, sachant que la PNIJ est une cible potentielle, du fait même de la concentration de données sensibles” indique Frédéric Péchenard dans son courrier.

Thales, gardien des clefs du temple

Au même moment, à l’automne 2011, un autre service s’est également “étonné” qu’un tel trésor atterrisse entre les mains d’une entreprise privée. La raison est un peu différente. Ce service parisien traitant de la délinquance financière craint que le gardien des clefs du temple, Thales, puisse avoir accès au contenu, les réquisitions et interceptions, ces “données sensibles” qu’évoquait pudiquement Frédéric Péchenard dans son courrier.

En creux, les craintes concernent l’étendue du pouvoir des administrateurs du système, des salariés de Thales qui auront accès à l’ensemble du système. Le projet prévoit pourtant que toutes les données soient chiffrées. En septembre, la délégation aux interceptions judiciaires évoquait devant Owni “un bunker sécurisé en béton armé”, certifié par les superflics de la DCRI (le FBI à la française). Insuffisant pour ses détracteurs : celui qui a créé le chiffrement pourrait le déchiffrer.

Le ministère de la Justice a-t-il pris en compte ces “réserves” ? Aujourd’hui, la délégation aux interceptions judiciaires “ne souhaitent pas répondre à nos question” arguant que “la relation de confiance” a été rompue avec la publication d’un document confidentiel-défense. Même son de cloche à l’ANSSI :

– Pas de commentaire.
- Pour quelle raison ?
- Pas de commentaire.

Nouvelle salve

Le nouveau gouvernement est décidé à poursuivre le projet. Selon nos informations, le cabinet du ministre de Manuel Valls l’a expliqué fin octobre lors d’une réunion consacrée à la PNIJ. La place Beauvau serait convaincue qu’il s’agit de la meilleure solution. Quitte à désavouer les futurs utilisateurs, consultés par les nouveaux grands chefs policiers.

La direction générale de la police nationale a demandé des rapports à plusieurs services dont la DCRI, la PJ et la préfecture de police de Paris, qui ont tiré une nouvelle salve de critiques. Remis au début de l’automne, les enquêteurs rappellent à nouveau le risque de concentrer en un seul lieu les données sensibles, évoquant le précédent WikiLeaks. A nouveau, ils rappellent le risque de les confier à une entreprise privée.

Thalès terre les écoutes

Thalès terre les écoutes

C'est sur son site d'Elancourt que Thalès, le géant de la défense française, garde précieusement la Plateforme nationale ...

Les services de police relèvent aussi que la PNIJ devra fonctionner 24h sur 24, 7 jours sur 7, sans souffrir de la moindre exception. La France ne compte que cinq systèmes avec de telles contraintes : la dissuasion nucléaire, la bourse, les réseaux électriques, la SNCF et l’aviation civile. Un défi technique, soulignent les policiers, que le personnel actuel ne pourra relever dimensionner ainsi en terme d’effectifs. Sauf bien sûr à recruter davantage ce qui augmenterait sensiblement l’ardoise, déjà salée.

Et encore, les coûts cachés sont nombreux. Le matériel qu’utilisent aujourd’hui les OPJ appartient aux quatre prestataires privés sous contrat avec l’Intérieur. Du matériel qu’il faudra renouveler. La PNIJ nécessitera aussi “une refonte totale du réseau national de transmission” écrivait Le Canard Enchaîné, citant “de grand chefs policiers”. Difficile d’obtenir une estimation du montant nécessaire, mais le ministère de l’Intérieur s’est dit conscient des coûts supplémentaires lors de la réunion de fin octobre.

Calembour

Un syndicat de police, Synergie Officiers (classé à droite) a pris la tête de la fronde contre la PNIJ, en interpelant par écrit le ministre de l’Intérieur [PDF]. Francis Nebot, le secrétaire national, redoute aujourd’hui de n’avoir pas été entendu. “Nous n’avons aucune information et sommes pourtant les premiers utilisateurs de la PNIJ” déplore-t-il.

Le système actuel ne fait pourtant pas l’unanimité, y compris au sein de la police. Certains proposent de garder le principe de la PNIJ pour des tâches de gestion. L’envoi des réquisitions passerait par la plateforme, mais le contenu serait directement renvoyé à l’officier traitant.

La plateforme ne contiendrait alors plus les précieuses “données sensibles”, sur lesquelles les policiers veulent garder la main mise exclusive, craignant une intervention de Thales, voire de l’exécutif. Ce qui a donné naissance à un calembour dans les services de police : “La PNIJ, c’est la plateforme de négation de l’indépendance de la justice”.


Photo par Misterbisson (cc-byncnsa) remixée par Owni /-)

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L’Anonymous Calin a été arrêté http://owni.fr/2012/10/19/lanonymous-calin-a-ete-arrete/ http://owni.fr/2012/10/19/lanonymous-calin-a-ete-arrete/#comments Fri, 19 Oct 2012 10:41:40 +0000 Pierre Alonso http://owni.fr/?p=123321 Owni, un nouveau membre français du collectif informel Anonymous a été arrêté lundi et mis en examen. Il s'agit de Calin que les superflics de la DCRI recherchent depuis plusieurs mois.]]>

Les superflics voulaient un Calin depuis des mois, il l’ont eu. Non pas la séance improvisée de free hugs, mais le membre du collectif informel Anonymous répondant au pseudonyme de Calin. Arrêté lundi 15 octobre, il a été placé en garde à vue, avant d’être mis en examen mercredi et présenté devant la juge Noémie Nathan, du pôle financier du tribunal de grande instance de Paris. Jointe par Owni, l’avocate de Calin Anne-Sophie Lagens confirme.

Une opération menée une nouvelle fois par la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI). Comme en janvier, comme en juin dernier. Et tout s’est enchaîné. En janvier, l’arrestation de Pierrick Goujon (Triskel) provoque l’ire d’Anonymous français qui lancent plusieurs attaques contre des sites. Le climat est chargé, explique Matthieu Hy, l’avocat de l’un des mis en examen :

En janvier se conjuguent trois motifs de protestation pour les Anonymous : les discussions autour du traité Acta, l’arrestation de certains d’entre eux ainsi que la fermeture de Megaupload.

La DCRI veut un calin

La DCRI veut un calin

Trois #Anonymous présumés ont été arrêtés par la DCRI. Le service de contre-espionnage français en recherche un ...

541 noms de policiers

L’une des protestations de janvier reste particulièrement en travers des autorités. Les identités, adresses mails et numéros de portable de 541 policiers du syndicat Unité-SGP Police (classé à gauche) sont diffusés par des Anonymous. Ces policiers étaient inscrits à la newsletter du site, a expliqué Nicolas Comte, le secrétaire général du syndicat. L’un des Anonymous arrêtés les aurait obtenus en exploitant une faille sur le site Internet.

Une faille parmi d’autres qu’il avait découverte et signalée six mois auparavant. Rien n’aurait été fait pour la combler, assure-t-il, plaidant la bonne foi. Plusieurs échanges avec l’administrateur du site de Unité-SGP Police se seraient tenus à ce moment-là. Une information que le syndicat avait confirmée à Owni en juin dernier, lors de l’arrestation de trois personnes suspectées entre autres de ce piratage.

Les policiers pensaient alors tenir Calin dans le trinôme arrêtés le 19 juin. Erreur. Seule deux personnes, sur les trois, sont mises en examen. L’un d’eux pour six motifs : l’accès et le maintien frauduleux sur les sites du syndicat et immigration.gouv.fr, la diffusion de la faille du site du syndicat, la collecte de données à caractère personnelle des 541 policiers, la mise en ligne de ces données personnelles, enfin pour association de malfaiteurs pour une attaque contre le site modernisation.gouv.fr.

4 100 adresses d’Anonymous

La traque a donc duré un peu moins de six mois, jusqu’en juin. Elle a fait appel à des ressources inattendues. Pour retrouver l’un des Anonymous, les policiers ont utilisé un document, diffusé par les Anonymous eux-mêmes. Des mésententes internes avaient poussé certains à publier les pseudo et emails de 4 100 Anonymous, une fuite qui a fait le bonheur des enquêteurs.

Les rapports de la DCRI sur Anonymous

Les rapports de la DCRI sur Anonymous

Depuis un an, la DCRI enquête sur un collectif d'Anonymous dans le cadre d'une procédure ouverte au Tribunal de grande ...

Les policiers ont pu faire le lien entre un pseudo et une adresse mail. Puis mettre un nom sur cette adresse mail en sollicitant fournisseurs d’accès, de messagerie, services bancaires… Un petit matin de juin, ils ont frappé à la porte de l’un des suspects. Lundi, c’était au tour de Calin.

Sa mise en examen pourrait signifier une clôture rapide de l’instruction. L’un des Anonymous arrêté en juin a été entendu mercredi par le juge Noémie Nathan. La magistrate du pôle financier a notamment relevé une vidéo, publiée par le mis en examen, pour apprendre à installer TOR – un logiciel qui permet d’anonymiser sa connexion Internet.

“Les vendeurs de masques sont-ils responsables si des braqueurs les utilisent ?” s’interroge le mis en examen. Son avocat comprend difficilement que le désir d’anonymat soit suspect :

Dans une démocratie, le vote n’est-il pas secret, anonyme ? Lorsqu’il s’agit de contester l’action d’une autorité étatique, les premiers Anonymous sont les électeurs.

Les 541 policiers dont les noms ont été publiés goûtent peu la sortie de leur anonymat (relatif). Plusieurs dizaines de policiers se sont constitués partie civile à ce jour. Ils veulent réclamer des dédommagements dont le montant pourrait vite devenir exorbitant si leur constitution est jugée recevable.


Photo par PaperBoyNYC [CC-by]

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La police dans le viseur http://owni.fr/2012/08/03/la-police-dans-le-viseur-police-tape/ http://owni.fr/2012/08/03/la-police-dans-le-viseur-police-tape/#comments Fri, 03 Aug 2012 09:35:43 +0000 Maxime Vatteble http://owni.fr/?p=117425

Capture d'écran de la vidéo de promotion de l'application Police Tape

Tout ce que vous photographierez pourra être retenu contre vous. Jerome Vorus, un jeune habitant de Washington D.C. de 21 ans l’a appris à ses dépends, un jour de juillet 2010. Alors qu’il marche dans les rues de Georgetown pour rentrer chez lui, il s’arrête pour prendre quelques clichés de policiers circulant près d’un feu rouge. Un officier désire savoir “par mesure de sécurité” pourquoi il avait choisi de photographier cet endroit. En quelques minutes, il se retrouve en état d’arrestation et doit prouver son identité.

Autorité et contradiction

On lui dit alors que prendre ce genre de photos et de vidéos est illégal, qu’une autorisation préalable est obligatoire. À sa grande surprise, une policière va immédiatement se contredire : elle sort un appareil photo numérique et commence à enregistrer la conversation.

Or, la juridiction de Washington D.C. est claire : il est légal d’enregistrer une prise vidéo ou audio d’une conversation à laquelle l’auteur de l’enregistrement participe. Jerome Vorus, tout comme la policière, a lui aussi parfaitement le droit d’enregistrer cette conversation avec les policiers.

Un des clichés de Jerome Vorus à l'origine du litige

De grands États américains comme Washington D.C. doivent encore et toujours justifier les libertés des photographes car les policiers en service n’aiment pas se faire tirer le portrait. Certains d’entre eux pensent que ces clichés troublent l’ordre public ou portent atteinte au droit à l’image et arrêtent leurs auteurs, sans aucun motif valable.

Le photographe amateur n’en reste pas là. Il se tourne vers l’American Civil Liberties Union (ACLU) pour faire valoir ses droits et attaque la brigade en justice. Le 19 juillet dernier, le district de Columbia lui donne raison et impose un nouveau code de conduite à la brigade, réaffirmant la pleine légitimité des photographes, amateurs ou professionnels, à prendre en photo un policier dans la rue :

Seulement le message est difficile à faire passer : au lendemain de la mise en application de ces nouvelles règles, un policier de la même brigade confisque, en civil, le téléphone d’un piéton enregistrant des policiers dans la rue. Washington D.C n’est cependant pas le seul État à connaître ces difficultés. C’est pourquoi Jerome Vorus s’est mis en tête d’aller photographier des policiers aux quatre coins du pays, pour savoir s’ils connaissent la Constitution et les lois qu’ils doivent faire respecter.

Rappel à l’ordre

Aux États-Unis le droit de photographier des policiers est reconnu dans le Premier amendement de la Constitution garantissant la liberté d’expression. C’est d’ailleurs l’argument qu’avait fait valoir le département de la Justice des États-Unis, administration équivalente au ministère de l’Intérieur, lors de faits similaires concernant la police de Baltimore en mai dernier. À la cinquième page d’une publication officielle adressée à cette administration, on peut lire :

Parce que l’enregistrement d’agents de police dans l’exercice public de leurs fonctions est protégé par le Premier amendement, les mesures politiques devraient interdire toute interférence avec d’autres activités de police, sauf dans des situations strictement restreintes. Plus particulièrement, ces mesures devraient indiquer aux fonctionnaires qu’exceptées certaines circonstances, ils ne doivent pas rechercher ou saisir un appareil photo ou appareil d’enregistrement, sans mandat.

En outre, ces mesures doivent interdire des actions plus subtiles qui peuvent néanmoins empiéter sur les droits des individus garantis par le Premier amendement. Les agents doivent être avisés de ne pas menacer, intimider, ou autrement décourager un individu d’enregistrer des activités policières de maintien de l’ordre ou de ne pas intentionnellement bloquer ou obstruer des caméras ou des appareils d’enregistrement.

Un rappel officiel des lois fédérales serait également utile dans l’État de Floride où un policier considère, en juillet 2012, que le simple fait de se balader avec une caméra est un acte “suspect.

Pour les associations de défense de libertés citoyennes comme l’ACLU, le cadre légal n’est pas assez contraignant. Les policiers interprétant le Premier Amendement à leur convenance ne peuvent plus agir comme s’ils étaient intouchables.

Surveillants surveillés

Nul n’est censé ignorer la loi aux États-Unis, surtout les policiers. Le copwatching, c’est-à-dire la surveillance des forces de l’ordre par les citoyens, est un mouvement répandu dans le pays depuis les années 1990 qui risque de prendre encore plus d’importance, grâce à l’appui technologique.

[MàJ] Les paparazzis de la police

[MàJ] Les paparazzis de la police

Apparition en France d'un premier site de surveillance des policiers. Les photos et les noms de dizaines de policiers sont ...

Tentée fin 2010 en France par le site Indymedia, l’expérience de copwatching avait provoqué l’indignation des syndicats policiers et du ministre de l’Intérieur de l’époque, Brice Hortefeux. Pourtant chaque Français est libre de photographier et de filmer un policier dans la rue, sauf exceptions. Les Américains restent très demandeurs de ce service.

Au début du mois de juillet, l’ACLU a décidé de lancer une application Android appelée Police Tape, destinée à lutter contre les policiers fâchés avec les photographes de rue. Gratuite, elle permet de photographier, filmer et enregistrer du son en toute discrétion : une fois lancée, Police Tape disparaît automatiquement de l’écran pour éviter toute tentative de suppression.

Une copie de l’enregistrement est conservée sur le téléphone et est envoyée sur un serveur sécurisé de l’ACLU, qui l’analysera elle-même. On y trouve également un précis des législations en vigueur pour que le photographe puisse se justifier, s’il est appréhendé par un policier à son domicile, dans la rue ou bien à bord d’un véhicule. Une version iOS est prévue dans le courant de l’été.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

La ville de New York avait été la première à tester ce genre d’outil en juin dernier, avec l’application locale Stop & Frisk Watch. Pour Alexander Shalom, conseiller juridique de l’ACLU, ce genre d’initiatives contribuera à faire évoluer les mentalités et faire respecter les droits fondamentaux des citoyens américains :

Historiquement, les images saisissantes de policiers maltraitant des citoyens ont piqué au vif les représentations collectives et ont parfois été à l’origine de poursuites judiciaires. La photo et la vidéo sont cruciales pour garantir la pleine responsabilité des forces de l’ordre. Elles doivent savoir que les yeux de la société civile sont en permanence braqués sur elles.

Une conviction partagée par le photojournaliste Carlos Miller, auteur du blog Photography is not a crime, qui se bat depuis plus de cinq ans pour que les droits des photographes professionnels soient également reconnus, au-delà de la complexité du droit américain.


Capture d’écran de la vidéo de présentation de l’application android pour Smartphones Police Tape.

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Grand prix de la répression http://owni.fr/2012/06/19/quebec-canada-manifestations-prix/ http://owni.fr/2012/06/19/quebec-canada-manifestations-prix/#comments Tue, 19 Jun 2012 13:03:10 +0000 Anaïs Richardin http://owni.fr/?p=113618

Police montée québécoise. Photo Xddrox

Lors du Grand prix de Formule 1 qui s’est tenu dimanche 10 juin à Montréal, les dispositifs policiers ont été renforcés pour tenir les manifestants à distance du lieu de l’événement et éviter toute perturbation. Protestant contre la hausse programmée des frais de scolarité et contre la liberticide loi 78 limitant leur droit de manifester, de nombreux contestataires mais aussi citoyens lambda se sont vu interdire l’accès à certaines stations de métro ainsi qu’au parc jouxtant le circuit. En un week-end, 139 personnes ont ainsi été arrêtées, dont 34 pour la seule journée du dimanche 10 juin. Sans compter le nombre de personnes gentiment -mais fermement- reconduites au métro par une escorte policière.

Depuis l’arrêt des négociations entre le gouvernement Charest et les associations étudiantes le 31 mai, le conflit s’enlise. Certains manifestants s’étaient donné rendez-vous dimanche pour tenter de perturber le trafic en utilisant la ligne jaune du métro desservant le lieu du Grand Prix.

Le Québec vibre

Le Québec vibre

Le Québec tranquille c'est fini. La Belle Province se rebelle avec force, dans la rue et sur les réseaux, contre des ...

Profilage politique

Une tentative de manifestation contrée par la police qui a employé les grands moyens pour évacuer les jeunes du métro et du parc Jean Drapeau. Depuis, les témoignages de cette journée circulent massivement sur internet laissant penser que les agents du Service de police de la ville de Montréal (SPVM) étaient à l’affut de toute personne arborant le symbole de la contestation : un carré rouge, ou un quelconque accessoire du kit du manifestant comme des lunettes de ski (permettant de marcher incognito sans pour autant contrevenir au règlement de la ville de Montréal qui interdit de manifester le visage couvert) un sac à dos, ou même le roman 1984 de George Orwell. De nombreuses personnes dénoncent dans la méthode d’arrestation un profilage politique. Une accusation réfutée par le directeur de la police de Montréal Marc Parent lors d’une conférence de presse lundi 11 juin :

Des usagers du métro se sont fait demander qu’on puisse fouiller leurs sacs. Il y en a eu une cinquantaine. La moitié ou plus n’avait pas de carré rouge. Et certains qui avaient un carré rouge sont entrés sur le site. Il n’y avait pas de fouille et d’intervention systémique sur les gens au carré rouge.

Nous nous sommes entretenus avec Ian Lafrenière, porte-parole du Service de police de la ville de Montréal (SPVM) qui conteste également cette version des faits :

Les personnes arrêtées de manière préventive sont des gens reconnus comme ayant participé à des manifestations violentes. Sur 180 000 personnes ce jour-là, seules 34 ont été arrêtées. Et sur les 250 000 personnes qui ont transité par le métro, seules 50 ont été dirigées vers la sortie.

Louve PB, de son vrai nom Virginie Bergeron, réfute ce motif d’arrestations. Dans un témoignage publié sur sa page Facebook, elle raconte avoir pris le métro pour se rendre au parc, sans porter de carré rouge, afin de passer inaperçue :

J’avais décidé de ne pas porter de carré rouge. Ni noir. En fait j’avais mis ce que j’avais apporté de plus candide. Une petite robe bleue et des sandales lacées. J’avais mon sac à dos rouge.

Tentative avortée, elle est arrêtée au bout de quelques minutes dans le métro. Escortée par les policiers, elle est alors obligée de prendre une rame en sens inverse pour retourner dans le centre de Montréal, où un comité d’accueil policier l’attend là aussi :

Une policière nous attend et nous dit que si on nous revoit dans une sation de métro, on va être arrêtés.

Pour la jeune femme, le profilage est donc bien réel, toute personne jeune arborant la couleur rouge et n’ayant pas de billets pour le Grand prix étant d’emblée déclarée persona non grata :

De ce que j’ai vu, les gens comme moi se faisaient arrêter à tout vent, on ne m’a jamais demandé de m’identifier. Du moment que j’ai dit que je n’avais pas mes billets je n’avais “pas d’affaire là” (rien à faire là, NDLR) et j’étais évacuée comme si j’avais commis une infraction

Deux journalistes qui étaient ce jour-là en immersion, portaient chacun une pièce de couleur rouge ainsi qu’un foulard et un sac à dos, laissant penser qu’ils étaient manifestants. À peine arrivés dans le métro, des agents demandent à fouiller leurs sacs mais les laissent monter dans la rame. Arrivés au parc du Grand prix, ils rebroussent chemin devant la forte présence policière mais se font arrêter avant de pouvoir regagner la bouche la plus proche, alors qu’ils discutent avec François Arguin, un citoyen qui filme, dit-il, toutes les manifestations. Ils racontent leur périple dans un article paru sur le devoir.com :

Deuxième fouille, donc, en moins de quinze minutes. Un groupe d’agent est formé autour de Raphaël Dallaire Ferland et Catherine Lalonde, un autre autour de François Arguin. Ils sont, en tout, seize agents pour trois individus. L’attitude, pour la même intervention, est beaucoup, beaucoup plus nerveuse que celle adoptée par les agents qui patrouillaient le métro. Les journalistes coopèrent, mais retournent une question pour chacune qu’on leur pose. Pourquoi nous fouiller? “Parce que vous arborez un signe révolutionnaire”, répondra un agent, visiblement excédé, “pis parce que je suis tanné du monde comme vous.”

Menaces fantômes

Ian Lafrenière, nous a expliqué que suite à certaines menaces et tentatives d’intimidation le SPVM avait décidé pour la sécurité de tous d’accroître la présence policière. Allusion à une phrase qui circula massivement lors des manifestations, faisant craindre un rassemblement important :

Charest tu ris mais check bien ton Grand prix.

En prévisions d’éventuelles violences, le SPVM avait donc massivement placé des agents sur la ligne jaune du métro jusqu’à l’entrée du circuit. Entre interpellations, arrestations et fouilles, 21 personnes ont même été placées en détention dans un bus, garé en plein soleil, qui les a reconduit en ville. Une arrestation dont une victime de la répression policière fait le récit :

Nous (les 21 citoyens détenus, NDLR) avons passé plus de trois heures dans le bus (un véhicule de la Société de transport de Montréal affrété pour l’occasion, NDLR), pour un total de quatre heures de détention, sans jamais avoir d’explications. J’ajoute d’autre part qu’à aucun moment nos droits ne nous ont été lus, bien que nous l’ayons réclamé à plusieurs reprises ; le seul droit qui me fut énoncé est l’absurde « droit de garder le silence » qui ressemblait davantage à un « ta gueule » à peine camouflé.

Nul n’est censé ignorer (ni bafouer) la loi

La manière dont les arrestations sont orchestrées suscite le débat. Les policiers ne semblent pas avoir de méthode précise, prenant pour cible des personnes qui leurs semblent sensibles et bafouant le code de déontologie des policiers du Québec.

Les citoyens sont bien décidés à ne pas rester muets face à une telle situation. Si bien que la police est aujourd’hui la cible d’attaques récurrentes. Anonymous a ainsi piraté les mails de 11 000 policiers la semaine dernière, publiant les listes d’adresses privées ainsi que le nom et le matricule des agents. Tandis que Moïse Marcoux-Chabot, un documentariste engagé dans le mouvement depuis ses débuts a réalisé un minutieux travail de documentation sur sa page Facebook. Il a relevé tous les articles de loi relatifs aux arrestations et s’est intéressé à la jurisprudence pour prouver que ces actions étaient illégales et abusives.

Cet intérêt pour la loi donne aussi aux citoyens les moyens de se défendre et les policiers se retrouvent bien souvent face à des personnes qui connaissent leurs droits et ne se démontent pas. Les détenus ne cessent ainsi de questionner les policiers sur leur arrestation. Le détenu du bus relate qu’il n’obtiendra aucune réponse en quatre heures de détention, si ce n’est la justification évasive de sa détention par l’article 31 du code criminel :

La seule raison légale de notre situation fut l’article 31 (1) du code criminel, sans que jamais ne soit précisé ce qui aurait pu les pousser à croire que nous allions troubler la paix.

L’alinéa 1 de l’article 31 stipule en effet qu’ « un agent de la paix qui est témoin d’une violation de la paix, comme toute personne qui lui prête légalement main-forte, est fondé à arrêter un individu qu’il trouve en train de commettre la violation de la paix ou qu’il croit, pour des motifs raisonnables, être sur le point d’y prendre part ou de la renouveler ».

Que constituent des « motifs raisonnables » ? Porter un sac à dos, comme cet enfant de cinq ans qui a du tendre son sac à un policier pour qu’il le fouille ? Ou même un foulard rouge comme Raphaël Dallaire Ferland, ce journaliste parti en reportage incognito dimanche?
Mais les arrestations préventives, qui ne sont  fondées que sur la conviction qu’une personne va commettre un délit, ne s’arrêtent pas là. Les personnes arrêtées sont fouillées, et leurs effets personnels parfois confisqués et altérés comme en témoigne François Arguin. Arrêté dimanche alors qu’il discutait à la sortie du métro avec les deux journalistes, il a été menotté, questionné et s’est vu saisir ses effets personnels, dont la caméra avec laquelle il filmait, avant que les policiers le relâchent après le contrôle d’identité:

On nous annonce que nous allons être escortés en dehors du site et on me remet ma camera, après avoir effacé toute la séquence vidéo d’évènements qui ont précédé notre interpellation, le harcèlement dont j’ai été victime et de la documentation des bris de mes droits fondamentaux de citoyen. C’est a dire profiter d’une journée du samedi a me promener au Parc Jean-Drapeau et filmer sans me faire harceler, insulter, menotter et expulser du parc sans raison par des policiers.

Les policiers se sont emparés de sa caméra pour en effacer le contenu, ce qui est arrivé à de nombreuses autres personnes. Des actes rapportés à Ian Lafrenière en début de semaine et qu’il ne comprend pas :

Ça me surprend beaucoup que les images aient été effacées. puisqu’il y a des caméras partout, des citoyens avec leurs téléphones et aussi les caméras de Radio Canada.

Les images circuleraient donc quoi qu’il arrive. Et quelles images. Cette vidéo de Radio Canada montre que les policiers sont sur les dents et font parfois preuve d’une brutalité qui ne semble pas nécessaire.

Enquête et surveillance

En théorie, l’état-major doit être informé de tout ce qui se passe sur le terrain. Mais face au comportement de certains agents, le SPVM dit avoir lancé des vérifications. Une enquête nécessaire pour faire disparaitre cette impression que les agents peuvent agir en toute impunité. Ian Lafrenière, lui, nous explique que les manifestants sont les auteurs d’une véritable campagne de désinformation :

On ne se bat pas à armes égales, nous de notre coté on se bat avec des faits. Nous faisons des vérifications et des contre-vérifications. On a entendu pendant des jours qu’un homme avait été tué par le SPVM. On a envoyé une équipe à la morgue et au final c’est un journaliste qui a retrouvé la personne, chez elle, bien vivante.

Les témoignages sont parfois à prendre avec des pincettes, mais lorsque beaucoup d’entre eux concordent, y compris avec ceux de journalistes sur place, le doute n’est plus possible. Aujourd’hui, des associations de victimes sont bien décidées à ne pas en rester là. Le comité légal de la CLASSE a ainsi annoncé sur une page Facebook dédiée, être à la recherche de témoins pour un recours judiciaire. De nombreux Québecois dénoncent sur les réseaux la montée en puissance de cet État policier à l’aide de vidéos, comme MrTherio6 qui a lancé sa chaine Youtube agrégeant les vidéos montrant la brutalité policière au Québec.

Cette vigilance des citoyens -copwatching-, s’est accrue depuis la répression massive des manifestations lors du G20 de 2009 à Toronto, mais elle ne semble pas être un problème pour Ian Lafrenière :

Une surveillance est souhaitée et souhaitable donc c’est bien qu’ils nous surveillent, mais il y a une différence entre la surveillance et la désinformation. En tout cas, une cohabitation est nécessaire.

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Les drones s’envolent pour de bon http://owni.fr/2012/06/18/les-drones-senvolent-pour-de-bon/ http://owni.fr/2012/06/18/les-drones-senvolent-pour-de-bon/#comments Mon, 18 Jun 2012 15:19:53 +0000 Pierre Alonso http://owni.fr/?p=113577

Des drones partout. Mini (inférieurs à deux kilos), petits (entre deux et 25 kg), moyen (entre 25 et 150 kg), massifs (au-delà), armés ou non, ces avions sans pilote occupent un espace croissant chez les industriels. Et dans les grand-messes de l’armement, comme celle qui se déroulait la semaine dernière au Parc des Expositions de Villepinte : l’Eurosatory 2012. La typologie des “aéronefs civils qui circulent sans aucune personne à bord”, les drones donc, vient d’être définie par un arrêté du 11 avril, Publié au Journal officiel le 10 mai 2012, du ministre des transports d’alors, Nathalie Kosciusko-Morizet.

Au-delà des inévitables chars d’assaut belges, des missiles sol-air de MBDA, des fusils mitrailleurs allemands et des revolvers turcs, les UAV pour Unmanned Aerial Vehicules (véhicules aériens non habités) étaient à l’honneur au salon des vendeurs d’armes. Pascal Zunino travaille depuis 2006 sur les drones. Il est directeur de la société Novadem :

En 2006, personne ne connaissait les drones dans les salons comme Eurosatory. Aujourd’hui, les visiteurs posent des questions précises, ils ont identifié leurs besoins et savent ce que peuvent leur apporter ces outils.

Novadem commercialise deux modèles de mini-drones et bientôt un troisième. Tous sont destinés à des fonctions de surveillance, civile et militaire. Sur le volet civil, ils sont utilisés sur des ouvrages d’art, des chantiers de grande ampleur, ou des infrastructures sensibles, comme le viaduc de Millau dans le Sud de la France. Sur le volet militaire, l’armée de terre a lancé une évaluation il y a un an environ. Les drones rempliraient alors des missions dites de ISR : intelligence (renseignement), surveillance and reconnaissance.

A gauche, le drone AR300 de Air Robot. A droite, le drone destiné à l'armée NX110m de Novadem

Secudrones distribue en France les drones allemands produits par Air Robot. Là aussi, l’objectif est tant civil que militaire, avec quelques succès selon le gérant français, Manuel Carballeda :

Les drones d’Air Robot sont utilisés par l’armée allemande en Afghanistan, par les fantassins pour la reconnaissance. En France, nous visons tant la gendarmerie que la police ou les pompiers.

Lobby

Jusqu’à l’arrêté du 11 avril, les drones étaient soumis à la législation sur l’aéromodélisme, ce qui provoquait l’ire des constructeurs. Peter van Blyenburgh est le président fondateur de UVS International qui a le statut d’association en France et défend les intérêts des fabricants :

C’est une première étape. La France est maintenant dans le peloton de tête européen en la matière, avec le Royaume-Uni, les Pays-Bas, la Suède, l’Italie et la République Tchèque.

L’arrêté met en place des critères de définition des drones et dispose qu’ils ne peuvent circuler qu’en “vue directe” du télépilote. Un premier pas frileux ? “Le début d’une démarche incrémentale” plaide le président de lobby qui insiste :

L’application civile aurait des bénéfices sociétaux immenses, avec des créations d’emploi.

Expérimentation

Les forces de sécurité lorgnent depuis longtemps sur ces petits engins maniables et facilement déployables. En 2008, une expérimentation a été lancée par la police française avec Elsa (Engin léger de surveillance aérienne). Pierre Petit Maire est l’un des concepteurs de ce drone, il est maintenant à la tête de KYU Aéro, également fabriquant de drones :

Dix opérateurs ont été formés à l’utilisation d’Elsa. Il venait de différents corps de la police : la police judiciaire, le Raid, les Renseignements généraux [devenus la DCRI depuis la fusion avec la Direction de la surveillance du territoire en 2008, NDLR], les RG de la Préfecture de police de Paris notamment. Les policiers voulaient connaître les apports des drones pour la maîtrise de la violence en zone urbaine et pour la lutte contre l’immigration illégale.

Deux enseignements sont ressortis de cette expérimentation, poursuit-il : “La rapidité de mise en oeuvre était très appréciée, mais il y avait encore des problèmes de transmission de vidéo et d’autonomie du drone. Ils n’étaient pas très puissants non plus : il ne pouvait voler avec des vents supérieurs à 40 km/h.”

Les services de renseignement lorgnent aujourd’hui plus qu’avant sur les drones, sinon d’attaque, du moins de surveillance. La Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE), les services extérieurs en seraient déjà équipés, de même que le GIGN. Les grands industriels de l’armement se sont lancés corps et âmes dans la conquête des véhicules volants sans pilote : Dassault, Sagem du groupe Safran, Cassidian du groupe EADS. EADS qui a récemment racheté une entreprise pionnière du secteur, Survey Copter.

Militaire et paramilitaire

La revanche des drones

La revanche des drones

La semaine dernière, le chef du mouvement des Taliban au Pakistan aurait été tué par un drone américain qui survolait le ...

Son directeur, Jean-Marc Masenelli, explique viser les secteurs “civil, militaire et paramilitaire”, qui renvoient aux forces de polices et de gendarmerie, en France et à l’étranger. Les drones à usage militaire vendus à l’étranger, “en Asie, en Afrique et dans le Golfe [persique]“ doivent recevoir l’autorisation de la Commission interministérielle pour l’étude des exportations de matériel de guerre (Cieemg). Ces drones petits et moyens sont destinés à des fonctions de surveillance des côtes ou des frontières, raconte Jean-Marc Masenelli.

Des drones qui ne sont pas armés, contrairement aux produits de Dassault. Devant le grand espace de l’avionneur à Eurosatory, trônaient les réalisations du constructeur français, avec en pointe le Rafale (le célèbre avion de chasse qui ne parvient pas à s’exporter) et juste derrière les avions de combat sans pilote :  nEUROn construit avec le Britannique BAE Systems, Voltigeur avec l’israélien IAI…

Des industriels moins disponibles que les PME pour répondre à nos questions. Personne n’était présent hier après-midi, nous a-t-on dit aux espaces de Cassidian, Safran et Dassault, pour parler des drones à la presse. Coordonnées laissées, nous attendons toujours leur coup de fil.


Photos de Pierre Alonso

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Joly flambe sur l’électricité http://owni.fr/2012/04/10/joly-flambe-sur-lelectricite/ http://owni.fr/2012/04/10/joly-flambe-sur-lelectricite/#comments Tue, 10 Apr 2012 16:55:03 +0000 Marie Coussin http://owni.fr/?p=105342 OWNI-I>Télé.]]>

L’écart est désormais plus que serré au pied du classement quotidien du Véritomètre, permettant de vérifier l’exactitude des déclarations chiffrées ou chiffrables des six principaux candidats à la présidentielle. Seuls 0,5 petits points séparent Nicolas Sarkozy (43,9 % de taux de crédibilité) de la lanterne rouge Marine Le Pen (43,4 %) alors que Jean-Luc Mélenchon conserve sa première place à 61,6 %.

Au cours des dernières 24 heures, l’équipe du Véritomètre a vérifié 62 citations chiffrées des candidats à l’élection présidentielle. Résumé des quelques faits qui ont retenu notre attention.

Joly s’électrise

Invitée de Bruce Toussaint sur Europe 1 le 9 avril, la candidate d’Europe-Écologie Les Verts a tenté de préciser les tarifs de l’électricité :

Le mégawatt heure c’est autour de 60 euros en temps normal.

Malheureusement pour Eva Joly, l’Observatoire des marchés de gaz et de l’électricité de la Commission de régulation de l’énergie ne comptabilise pas les tarifs “normaux” ; uniquement les tarifs de base et les tarifs de pointe qui s’établissaient respectivement, au dernier trimestre 2011, à 51 et 62 euros.

L’expression “en temps normal” évoquerait davantage le tarif de base, cependant, le chiffre mentionné par Eva Joly est très proche du tarif de pointe. Ses propos peuvent donc être jugés imprécis.

Au cours de la même interview, Eva Joly évoque également un tarif exceptionnel :

Nous nous avons acheté de l’énergie, en février, le 9 février, à 1 700 euros le MW/h.

Au cours du mois de février, la vague de froid sévissant en France a en effet entraîné une hausse importante du prix du mégawatt heure. Le prix du mégawatt heure a atteint une moyenne de 370 euros sur la deuxième semaine de février avec un record à 1 938 euros le jour évoqué par la candidate.

Eva Joly est donc correcte… sur la date, mais non sur le chiffre, qui s’éloigne de 12 % du prix effectivement payé pour un mégawatt heure le 9 février dernier.

L’Europe amoindrie de Nicolas Sarkozy

Lors de sa conférence de presse de présentation de programme, le 5 avril dernier, le président-candidat a notamment insisté sur un supposé record français :

La France est le seul pays occidental à n’avoir connu aucun trimestre de récession – le seul -, depuis le deuxième trimestre 2009. Aucun, absolument aucun.

Concernant l’absence de récession, les propos de Nicolas Sarkozy sont justes. Tout juste mais justes : depuis le second trimestre de 2009, la France oscille entre 0 % (second trimestre 2011) et 0,9 % de croissance, pour une moyenne de 0,34 % sur cette période. Par contre, elle est loin d’être la seule des pays européens à tenir ce record. La Suisse et la Pologne ont réalisé une performance similaire, avec des taux de croissance globalement bien meilleurs : 0,52 et 0,98 %.

François Hollande oublie les gendarmes

A plusieurs reprises, François Hollande a évoqué les coupes dans les effectifs des forces de l’ordre durant le quinquennat de Nicolas Sarkozy. Il affirme ainsi à Bondy le 26 mars :

Il y a eu 12 000 suppressions de postes de policiers depuis 5 ans.

A Boulogne-sur-Mer, le lendemain, 27 mars, il conserve son estimation, mais en y ajoutant les gendarmes :

Il y a eu 12 000 postes de policiers et de gendarmes qui ont été supprimés.

Et reformule exactement la même estimation, sous la forme interrogative, à Mont-de-Marsan, le 29 :

Qui a supprimé 12 000 postes de policiers ou de gendarmes depuis 2007 ?

Une récente correction bien inspirée. En effet, le projet de loi de finances 2012 (chapitre Sécurité) rapporté au Sénat fait le point sur les effectifs de la police nationale et de la gendarmerie : nombre de postes ETP (équivalents temps plein) ouverts pour 2012 et nombre de postes supprimés sur les dernières années. Ainsi, entre 2008 et 2012, 6 838 ETP de policiers ont été supprimés contre 5 504 en gendarmerie, soit un total de 12 342.

Quand François Hollande évoque “policiers et gendarmes” comme à Boulogne-sur-Mer et Mont-de-Marsan, ses propos sont effectivement corrects. Par contre, quand il oublie les gendarmes comme à Bondy son évaluation est surestimée de près de la moitié.


Les vérifications des interventions sont réalisées par l’équipe du Véritomètre : Sylvain Lapoix, Nicolas Patte, Pierre Leibovici, Grégoire Normand et Marie Coussin.
Retrouvez toutes nos vérifications sur le Véritomètre et nos articles et chroniques relatifs sur OWNI
Illustrations par l’équipe design d’Owni /-)

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Des SMS furtifs sur vos portables http://owni.fr/2012/01/26/vos-sms-furtifs/ http://owni.fr/2012/01/26/vos-sms-furtifs/#comments Thu, 26 Jan 2012 09:59:34 +0000 Fabien Soyez http://owni.fr/?p=94755

C’est une question au gouvernement qui nous a mis la puce à l’oreille. En juin 2011, Colette Giudicelli, sénatrice des Alpes Maritimes, écrit à Claude Guéant, ministre de l’intérieur :

Plusieurs services de police judiciaire et de renseignement étrangers utilisent des SMS furtifs pour localiser des suspects ou des personnes disparues : cette méthode consiste à envoyer vers le téléphone portable de ce suspect un SMS qui passe inaperçu et renvoie un signal à l’émetteur du message. Mme Colette Giudicelli aimerait savoir si cette procédure est déjà utilisée en France.

Sept mois plus tard, toujours pas de réponse du gouvernement. Le sujet aurait pu tomber aux oubliettes s’il n’y avait eu, fin décembre, la 28ème édition du Chaos Communication Congress, à Berlin. Lors de cette conférence de hackers, le chercheur Karsten Nohl expert en sécurité de mobiles lance : “En Allemagne, la police a envoyé en 2010 des milliers de SMS furtifs pour localiser des suspects.”

Le SMS furtif obéit au principe du signal aller-retour que l’on ne voit pas, ou du “ping” dans le jargon des informaticiens. Les développeurs de la société Silent Services, à l’origine d’un des premiers logiciels permettant d’envoyer ce genre de SMS, expliquent :

Les SMS furtifs vous permettent d’envoyer un message à un autre portable à l’insu de son propriétaire. Le message est rejeté sur le téléphone de ce dernier et il n’existe aucune trace. Vous obtenez, en retour, un message de l’opérateur vous attestant que votre message a été reçu.

Techniquement, les SMS furtifs, ou “silent SMS“, serviraient donc à savoir si une personne a allumé son portable et permettraient aux opérateurs de “tester” les réseaux, sans gêner les usagers. Mais une toute autre utilisation en est faite par les services de renseignement et la police. Contacté par OWNI, Neil Croft, diplômé du département des sciences informatiques de l’Université de Pretoria, en Afrique du Sud, explique :

Envoyer un SMS furtif, c’est comme envoyer un SMS normal, sauf que le mobile ne voit pas le message qu’il a reçu. Les informations du SMS sont modifiées, dans le programme de codage des données, pour que l’utilisateur qui le reçoit ne s’aperçoive de rien. Un SMS furtif peut aider les services de police à détecter un mobile sans que la personne concernée soit au courant de la requête.

Pour trafiquer les informations du SMS et le rendre silencieux, les services de sécurité passent par une passerelle SMS, comme Jataayu SMS gateway, qui permet d’interconnecter les systèmes GSM et informatique. Neil Croft, désormais président d’une société de marketing par SMS, nous explique :

Ces SMS furtifs sont aussi utilisés par certains hackers pour mener des attaques dites “de déni de service” (DDOS). Le résultat, c’est une batterie qui se décharge anormalement vite, et l’impossibilité de recevoir des appels. Un tel procédé ne coûte pas cher : on peut envoyer un SMS furtif par seconde pendant une heure pour environ 36 euros.

Ce procédé d’envoi en masse apparaît largement utilisé par les services. En novembre 2011, Anna Conrad, du parti Die Linke (La Gauche), pose une question écrite au Landtag de Rhénanie du Nord-Westphalie, à propos de l’usage par la police allemande de SMS furtifs, ou “Stille SMS”. Réponse du Parlement local : en 2010, le Land a mené 778 enquêtes et envoyé 256 000 SMS furtifs. Mais pour Mathias Monroy, journaliste à Heise online ces technologies de surveillance profitent surtout d’un vide juridique :

C’est très problématique pour la vie privée, parce que juridiquement, on ne sait pas si les SMS furtifs sont ou non une communication (…) Le Land a considéré que ce n’en était pas une, puisqu’il n’y a aucun contenu. C’est pratique, car s’il ne s’agit pas d’une communication, cela ne rentre pas dans le cadre de l’inviolabilité des télécommunications de l’article 10 de la Constitution allemande.

Et votre mobile se change en balise

Et votre mobile se change en balise

Des milliers de localisations cellulaires sont effectuées chaque année en France, notamment dans le cadre de procédures ...

Mais le 6 décembre, suite à une question d’un député de gauche, Andrej Hunko, sur l’utilisation des SMS furtifs par la police allemande, le ministre de l’intérieur a joué le jeu de la transparence. Au total, ces dernières années, les services de police et de renseignement allemands auront envoyé une moyenne de 440 000 SMS furtifs en un an.
Après chaque SMS envoyé, le lien était fait avec Vodafone, E-Plus, O2 et T-Mobile, les quatre opérateurs de téléphonie mobile, afin d’accéder aux informations de communication des personnes surveillées. Pour agréger les données brutes fournies par les opérateurs, la police allemande utilise les logiciels Koyote et rsCase, fournis par Rola Security Solutions, une société qui élabore des “solutions logicielles pour la police” depuis 1983.

Souriez, vous êtes pistés

Le journaliste spécialisé Mathias Monroy s’inquiète d’une utilisation croissante de ces technologies de surveillance. Car les SMS furtifs permettent de connaître très finement la position des personnes espionnées. Cette localisation utilise le réseau GSM, comme nous l’explique Karsten Nohl :

On peut localiser un utilisateur en repérant les trois antennes relais les plus proches de son mobile, puis en déduisant, par triangulation, la distance d’après la vitesse que met un signal [comme un SMS furtif, NDLR] à faire un aller-retour.Un téléphone mobile met à jour sa présence sur le réseau régulièrement, mais quand la personne se déplace, l’information n’est pas mise à jour tout de suite. En envoyant un SMS furtif, la localisation du mobile est instantanément mise à jour. C’est très pratique, parce que cela permet de localiser quelqu’un à un instant T, en fonction des ondes.

Un SMS furtif sert notamment (mais pas seulement) à affiner la position dans le temps, en forçant la mise à jour d’un mobile. Une technique bien plus efficace qu’une simple localisation cellulaire (Cell-ID). Contacté par OWNI, François-Bernard Huyghes, chercheur à l’IRIS, commente l’utilisation de ces SMS furtifs :

C’est la seule méthode immédiate et pratique pour suivre constamment un mobile hors des périodes d’utilisation. On parle alors de géopositionnement et non plus de géolocalisation. Après cela, soit les policiers suivent l’information via les opérateurs, soit des sociétés privées traitent les données et, par exemple renvoient à l’enquêteur une carte où apparaissent les déplacements du téléphone surveillé en temps réel.

Les bénéfices des SMS furtifs ne s’arrêtent pas là : en envoyant un grand nombre de ces SMS les services de sécurité peuvent aussi perturber le mobile, ou réactiver ses signaux à distance ou encore décharger sa batterie. Un porte-parole du ministère de l’Intérieur Allemand explique à OWNI :

La police et les services de renseignement allemands utilisent les SMS furtifs pour réactiver des mobiles inactifs et améliorer la géolocalisation d’un suspect, par exemple quand celui-ci se déplace lors d’une entrevue. Les SMS furtifs sont un outil précieux d’investigation, qui est utilisé uniquement dans le cadre d’une surveillance des télécommunications ordonnée par le juge, dans un cas précis, sans jamais violer le droit fondamental à la protection de la vie privée.

Réactiver à distance

En France, la police et les services de renseignement travaillent notamment avec Deveryware, un “opérateur de géolocalisation”, qui vend également aux entreprises un service de “géopointage” de leurs salariés, le Geohub, accessible via une base de donnée baptisée DeveryLoc.

Pour alimenter son Geohub, Deveryware combine la localisation cellulaire, le GPS, ainsi que d’autres techniques de “localisation en temps réel”. Quand on demande à la société si les SMS furtifs font partie de ces techniques, réponse évasive :

Nous sommes au regret de ne pouvoir répondre, vu le caractère confidentiel imposé par les réquisitions judiciaires.

Les applications de Deveryware permettent aux enquêteurs de cartographier les déplacements d’un suspect et d’en avoir un historique. Interrogé par OWNI, Laurent Ysern, responsable investigation pour SGP Police, constate :

Tous les services d’investigation ont accès à la plateforme de Deveryware. Grâce à ce système, on peut suivre une personne sans être obligé d’être derrière elle. Pas besoin de filatures, donc moins de fonctionnaires et de matériel à mobiliser.

Alors qu’en Allemagne, le ministère de l’Intérieur répond dans les 48 heures, en France, étrange silence. Unique réponse, provenant du Service d’information et de communication de la police nationale :

Malheureusement, personne à la PJ ou à la sécurité publique ne veut communiquer sur le sujet, ce sont des techniques d’enquête…

Même silence chez les opérateurs, SFR et Bouygues Telecom. Sébastien Crozier, délégué syndical CFE-CGC-Unsa chez France Télécom-Orange, lance :

Les opérateurs collaborent toujours avec la police, c’est une obligation de service public : ils agissent sur réquisition judiciaire, tout comme pour les requêtes de fadettes. Il n’y a pas de méthode absolue, l’envoi de SMS est une partie des méthodes utilisées pour géolocaliser un utilisateur. On utilise surtout cette technique pour “réactiver” le téléphone : le réseau va se mettre en situation active.

En France, d’ici à 2013, l’utilisation de ces procédés de surveillance entreront dans une phase industrielle. Le ministère de la Justice mettra sur place, avec le concours de la société d’armement Thales, une nouvelle plateforme nationale des interceptions judiciaires (PNIJ), qui devrait permettre de centraliser l’ensemble des interceptions judiciaires, autrement dit les écoutes, mais aussi les réquisitions telles que les demandes de localisation cellulaire. Sébastien Crozier remarque :

Cette interface entre officiers de police judiciaire et opérateurs permettra de rationaliser les frais de justice, de réduire les coûts de traitement de moitié, parce que jusqu’ici, les réquisitions sont gérées commissariat par commissariat… Il y aura encore plus de demandes, mais ça sera moins coûteux pour les opérateurs comme pour la police.


Couverture, Illustrations et photos sous licences Creatives Commons via Flickr par Nicolas Nova ; Arlo Bates ; Keoshi ; Luciano Belviso ; Meanest Indian ; Photo de couverture remixée par Ophelia Noor avec l’aimable autorisation de Spo0nman [CC-by-nc-nd]

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L’agenda de l’Intérieur http://owni.fr/2011/10/31/lagenda-de-linterieur-gueant-surveillance-sarkozy-police/ http://owni.fr/2011/10/31/lagenda-de-linterieur-gueant-surveillance-sarkozy-police/#comments Mon, 31 Oct 2011 14:29:47 +0000 Jean Marc Manach http://owni.fr/?p=84956 Et si, en terme de “solidarité citoyenne” , les citoyens étaient invités à collaborer à l’effort d’”observation, de signalement, de prévention et d’échange” des forces de sécurité publique, et notamment de leurs services de renseignement ? Cette proposition figure en bonne place du Livre blanc sur la sécurité publique qui vient d’être remis à Claude Guéant. Au programme, également : “cyber-patrouilles” et mini-drônes, développement de la reconnaissance faciale policière via la création du “troisième grand fichier policier“, croisant les photos de plus de deux millions de “suspects” avec l’analyse automatisée des images de vidéosurveillance, et déploiement de nouvelles incriminations afin d’interdire à certains citoyens mécontents d’aller manifester.

Conçu comme “réflexion prospective et proactive relative à ce que l’on pourrait ou devrait faire, à charge ensuite pour les autorités publiques de prendre, au menu ou à la carte, ce qui leur paraît faisable“, le Livre blanc sur la sécurité publique, écrit avec Michel Gaudin, le préfet de police de Paris, entend “perturber les habitudes” :

Les experts ne doivent pas se transformer en militants. Au-delà de leurs opinions légitimes, leur rôle n’est pas de donner des leçons aux responsables politiques, mais de leur fournir des informations les plus objectives possibles, parfois avec des orientations contradictoires, en vue de la prise de décision.

Pudiquement qualifié de “débat passionné“, celui qui concerne « la culture du résultat » tendrait ainsi à “obscurcir les conditions d’évaluation rationnelle des politiques de sécurité en raison de son schématisme et du manque d’indicateurs pertinents” (voir aussi Alain Bauer ou le paradoxe sécuritaire).

Dénonciation anonyme vs “solidarité citoyenne”

En attendant, et sur la base du travail des 6 groupes de réflexion constitués à cet effet, et regroupant plus de 80 responsables de la police et de la gendarmerie, le Livre blanc synthétise 86 propositions qui cherchent notamment à “mieux prendre en compte le ressenti et les attentes de la population“, et insistent sur l’aspect humain de la sécurité.

Il est ainsi question de la création d’un “nouveau module de formation dédié à l’accueil, au contact et au dialogue (…) donnant lieu à la remise officielle de la charte de l’accueil et du code de déontologie à la sortie des écoles de police et de gendarmerie“, mais également d’améliorer l’accompagnement et le suivi des victimes en y associant psychologues, travailleurs sociaux et associations d’aides au victimes.

A contrario, il est aussi question de pénaliser ceux qui refuseraient de coopérer, via la création d’un “délit d’entrave à l’enquête judiciaire en cas d’obstruction active“, et la transposition pour les témoins d’une “obligation de témoigner” (sic). Mais également de “structurer le contact avec le public sur la base d’une doctrine de « solidarité citoyenne » fondée sur la responsabilité et évitant les risques de la dénonciation anonyme, en définissant les notions d’observation, de signalement, de prévention et d’échange responsable“, notamment dans le cadre des services de renseignement de sécurité publique (incarnés notamment par la sous-direction à l’information générale -SDIG- les ex-RG) :

Afin d’améliorer le partenariat de sécurité avec la population, il apparaît enfin nécessaire de déterminer la capacité des citoyens à apporter une plus-value aux services de sécurité publique (renseignements, appuis opérationnels …).

Plusieurs démarches, relevant davantage du sens civique que de la véritable implication dans le partenariat de sécurité, pourraient ainsi être développées en lien étroit avec les forces de sécurité, les élus et les autorités administratives et judiciaires, sous 4 formes éventuelles : l’observation, le signalement, la prévention et l’échange.

Cette posture d’observateur doit conduire les habitants d’un quartier à détecter les situations inhabituelles (présence d’un véhicule suspect…) et à aider et conseiller les personnes vulnérables (personnes âgées isolées …).

Cyber-patrouilles et mini-drônes

Le recours aux nouvelles technologies n’est pas en reste : le Livre blanc propose ainsi de “déployer sur l’ensemble du territoire le traitement de pré-plainte en ligne“, de développer les échanges numérisés avec la population par blogs et réseaux sociaux interposés, mais également d’”établir des partenariats industriels pour le perfectionnement et la sécurisation des dispositifs de neutralisation à létalité réduite“.

Il est aussi question de géolocaliser les équipes, de recourir à la “cartographie opérationnelle intégrée (support cartographique + outils statistiques et d’analyse qualitative + info-centre)” pour mieux couvrir le territoire dans les lieux et aux horaires sensibles -et donc d’entamer une forme de police prédictive-, d’utiliser les “fonctionnalités de la vidéoprotection en temps réel” pour détecter les situations de tension ou anormales, d’exploiter les “outils d’analyse automatique des anomalies” (sic) proposés par les logiciels de “vidéosurveillance intelligente“, ou encore de pouvoir identifier une personne “à partir de sa signature vocale“, entre autres technologies dignes des films d’espionnage :

Les possibilités offertes par la voie aérienne sont également sous-exploitées : accès ponctuel aux données de la surveillance spatiale de haute résolution, recours à l’avion pour des missions de surveillance ou de filature (…) ou à des mini-drônes pour des distances et des périodes courtes.

La surveillance effective des comportements illicites dans l’internet implique aussi de donner des moyens de « cyberpatrouille » moins rudimentaires aux policiers et gendarmes : les technologies d’analyse sémantique et d’indexations de sites, ainsi que des capacités d’intrusion de sites protégés devront être développées.

Enfin, et face à la multiplication des projets visant à doter les policiers de “terminaux multifonctions“, le Livre blanc plaide pour une “stratégie globale convergente” afin de leur permettre d’y associer “géolocalisation, lecture de titre d’identité, de voyage ou de conduite sécurisés, lecture automatisée de plaques d’immatriculation, interrogation de fichiers, rédaction et envoi de comptes-rendus d’intervention, prise de plainte ou déclaration de main courante, verbalisation électronique, recueil et transmission d’images vidéo“…

Reconnaissance faciale policière

De façon plus notable, les auteurs du Livre blanc proposent également de “restructurer les fichiers locaux pour créer un troisième grand fichier de police technique reposant sur l’image du visage : la base nationale de photographies“, qui regrouperait 70% des 2,4 millions de clichés et portraits-robots du fichier STIC-Canonge de la police nationale, et les photographies (de face, de trois-quarts et de profil) de 393 000 personnes ayant fait l’objet d’une mise en cause délictuelle ou criminelle figurant dans le Fichier automatisés des empreintes digitales (FAED).

L’objectif est de “développer le recours aux logiciels de reconnaissance automatisée par l’image pour en faciliter l’exploitation et accélérer la résolution des enquêtes judiciaires disposant d’indices tirés de la vidéoprotection“, en clair : chercher, dans les images de vidéosurveillance, ceux dont les visages figureront dans ce “troisième grand fichier de police“.

Pour Alain Bauer, l’un des mérites non négligeables de ce nouveau fichier serait de sortir le ministère de l’Intérieur de l’état de non-droit qui caractérise le Canonge, et qu’il conteste, de concert avec la CNIL, dans la mesure où l’inspecteur Canonge qui l’avait créé dans les années 50 l’avait conçu pour effectuer des recherches en fonction de profils ethniques (noir, blanc, jaune et arabe), une situation qui perdure aujourd’hui, en pire :

Informatisé en 1992, Canonge s’est perfectionné dans la description initiale en retenant douze catégories « ethno-raciales », toujours en vigueur : « blanc (Caucasien), Méditerranéen, Gitan, Moyen-Oriental, Nord Africain, Asiatique Eurasien, Amérindien, Indien (Inde), Métis-Mulâtre, Noir, Polynésien, Mélanésien-Canaque ».

Le nouveau fichier, lui, ferait fi de ce fichage ethnique illégal, privilégiant les données objectives issues de la reconnaissance biométrique des traits du visage, de leurs couleurs… Alain Bauer reconnaît que le taux d’erreur, de l’ordre de 10%, n’en fait pas un véritable outil de police “scientifique“, mais, comme le souligne le rapport, “une assistance à la sélection et à la comparaison physionomique“.

Claude Guéant, lui, table sur l’amélioration des performances de la reconnaissance faciale pour en faire, à terme, un outil particulièrement performant de repérage a posteriori, voire en temps réel, à la volée, des criminels et délinquants. Ce pour quoi, d’ailleurs, il plaide pour que la base de données biométriques des “45 millions de gens honnêtes” de son projet de carte d’identité sécurisé puisse être utilisée de façon policière, ce qui fait tiquer la CNIL.

La possibilité est d’autant moins hypothétique que l’injonction affichée sur tous les photomatons, et les prospectus du ministère de l’Intérieur, interdisant aux gens de sourire ou de rigoler sur leurs photos d’identité, répond à une exigence technique : pour que les logiciels de reconnaissance faciale puissent reconnaître nos visages, il nous faut se conformer à leur grille d’analyse…

Les manifestants ? Des hooligans en puissance

Le Livre blanc cherche également à répondre à la multiplication des contre-sommets et autres manifestations déclarées (+100%, à Paris, depuis 2007) ou pas, et notamment à l’explosion du nombre de rassemblements du type Occupy Wall Street, #SpanishRevolution, en écho au Printemps arabe.

S’inspirant explicitement de la possibilité d’interdire à certains hooligans d’assister à des matchs de football, voire même d’aller pointer, à l’heure dite, au commissariat, les auteurs du rapport proposent ainsi de “permettre d’interdire aux personnes constituant une menace grave pour l’ordre public de se trouver à proximité d’une manifestation de voie publique“, mais également de créer “une nouvelle contravention pour la participation à une manifestation non déclarée après appel à la dispersion“…


Illustration CC Neno° (Ernest Morales).

Image de “une” CC Myxi.

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La France équipe la police iranienne http://owni.fr/2011/10/19/la-france-coopere-avec-la-police-iranienne/ http://owni.fr/2011/10/19/la-france-coopere-avec-la-police-iranienne/#comments Wed, 19 Oct 2011 06:27:40 +0000 Pierre Alonso http://owni.fr/?p=83882 En toute discrétion, la France coopère avec les services de police iraniens, par l’entremise de la société de conseil et de service du ministère de l’intérieur français. Contacté par OWNI, un responsable de la société, Civipol, confirme l’envoi de 20 chiens renifleurs. Cette première livraison, sur un total de 52 chiens, sera effectuée le 25 octobre. Elle est financée par le Quartier général de contrôle de la drogue (Drug Control Headquarters) iranien qui dépend du président de la République.

Officiellement, il s’agit de lutter contre le trafic d’héroïne importée d’Afghanistan et transitant par le sol iranien avant d’abreuver les marchés européens. Mais ces chiens pourraient avoir d’autres usages répressifs.

L’opération fait grincer des dents jusqu’au sein du ministère français de la défense, à qui revient la charge de former les chiens en collaboration avec la police nationale. La transaction n’est pas du goût de la Grande Muette, peu encline à endosser la responsabilité de la coopération en matière de sécurité alors que les relations avec Téhéran sont pour le moins tendues. Sans compter le sort – expéditif – réservé aux trafiquants de drogue en Iran…

Vindicte des capitales occidentales

Dernier exemple en date des tensions diplomatiques, le Conseil des affaires étrangères de l’Union Européenne a voté le 10 octobre une nouvelle vague de sanctions. Elles ciblaient 29 responsables iraniens « impliqués dans la répression et la violation des droits de l’homme » a expliqué le Quai d’Orsay dans un communiqué. Deux jours plus tard, Washington accusait l’Iran d’être derrière une rocambolesque tentative d’assassinat de l’ambassadeur saoudien aux Etats-Unis.

Dans ce climat, la formation des chiens n’a pas fait consensus. C’est l’Etat-Major particulier, directement relié à l’Elysée, qui a donné le feu vert, nous a-t-on confié. Personne ne désirait endosser cette responsabilité au ministère de la défense. Un affront inhabituel d’une institution à la réputation moins rebelle, mais l’utilisation des chiens renifleurs inquiète. Il n’est pas impensable que les chiens renifleurs soient utilisés comme chiens mordants. Comprendre pour le contrôle des foules.

Un rapport d’information de la Commission des affaires étrangères de l’Assemblée, déposé le 5 octobre 2011, consacre un long développement à la « répression ferme, suivie d’une dégradation de la situation des droits de l’Homme » depuis 2008. Et de citer, rapports d’Amnesty International et Human Rights Watch à l’appui, « un système de répression massif dirigé contre tous les manifestants » que des chiens déjà dressés pourraient renforcer.

Plus inquiétant, les trafiquants de drogue arrêtés par le régime iranien sont promis à un funeste destin. Les députés de la Commission rapportent que l’ambassade de France en Iran comptait jusqu’à 360 exécutions entre le début de l’année et mi-juin 2011, dont 274 seraient confirmées, la différence étant liée aux « pendaisons de masse des trafiquants de drogue » partiellement confirmées.

En 2010, l’Iran arrivait juste derrière la Chine avec plus de 252 exécutions, contre plus d’un millier par Pékin. Un triste record ramené au nombre d’habitants. Le 13 mai dernier, le secrétaire général du Haut Commissariat pour les droits humains en Iran avait reconnu « le nombre élevé d’exécutions et les avait attribuées aux efforts pour combattre le trafic de drogue » précise un rapport du secrétariat général des Nations-Unies publié le 15 septembre 2011.

Coopérations culturelle et scientifique au point mort

La coopération a connu de meilleurs jours entre la France et l’Iran. Sur les plans culturel et scientifique, elle tourne au ralenti depuis la réélection jugée frauduleuse de Mahmoud Ahmadinejad en juin 2009. Côté iranien, un diplomate nous a assuré que la coopération s’était dégradée avec l’arrivée au pouvoir de Nicolas Sarkozy, unique responsable de l’actuel état des relations conformément à l’antienne diplomatique iranienne.

A propos de la coopération cynotechnique – les chiens, donc – le site de Civipol mentionne trois expériences passées : deux audits en janvier et septembre 2007, ainsi qu’une livraison de vingt chiens en septembre 2008. D’autres ont eu lieu, nous a assuré un responsable de la société, ajoutant que le site n’était plus à jour, sans préciser le détail des opérations antérieures. Les tensions apparues en juin 2009 avaient provoqué une interruption dans les livraisons de chiens. Une information dont le ministère des affaires étrangères assure aujourd’hui ne pas avoir connaissance : « Nous n’avons pas d’information sur l’interruption des livraisons ».


Photo via FlickR LeoAmadeus [by-nc-sa] Defence Images [by-nc]

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Un flic pourfend le système http://owni.fr/2011/10/18/un-flic-pourfend-le-systeme/ http://owni.fr/2011/10/18/un-flic-pourfend-le-systeme/#comments Tue, 18 Oct 2011 11:27:45 +0000 Jean-Marc Manach et Guillaume Dasquié http://owni.fr/?p=83128

Ce jeudi 20 octobre, le Tribunal administratif se penchera sur le cas du commandant Philippe Pichon, exclu de la police nationale le 20 mars 2009 par arrêté de la ministre de l’époque Michèle Alliot-Marie, pour avoir évoqué plusieurs pratiques illicites en vigueur dans la police. Et en particulier pour avoir osé dénoncer les dysfonctionnements du Système de traitement des infractions constatées (STIC).

Pichon, qui entend bien retrouver tous ses droits, conteste le bienfondé de l’arrêté ministériel. Et la juridiction administrative lui a, dans un premier temps, accordé le bénéfice du doute en ordonnant sa réintégration provisoire ; dans l’attente de cette audience de jeudi, consacrée au fond du dossier.

Outre un essai décapant publié en 2007 chez Flammarion, “Journal d’un flic”, son administration lui reproche surtout d’avoir mené campagne contre ce STIC. Véritable “casier judiciaire bis” truffé d’erreurs et de données obsolètes, et dans lequel un certain nombre de policiers viennent piocher des infos en dehors de tout cadre légal. Le STIC fiche pas moins de 5 millions de suspects et 28 millions de victimes, soit plus de la moitié de la population française.

Après avoir plusieurs fois alerté sa hiérarchie, en vain, sur ces dysfonctionnements, ayant même “évoqué la possibilité de s’en ouvrir à la presse ou dans un cadre universitaire“, Philippe Pichon aurait confié les fiches STIC de Jamel Debbouze et Johnny Halliday à un journaliste qui les lui avait demandées afin d’en démontrer le peu de sérieux – c’était dans la foulée du scandale autour du fichier EDVIGE. Et le site Bakchich.info les publia dans un article intitulé “Tous fichés, même les potes de Nicolas Sarkozy“.

Traçabilité de l’approximation

Si le STIC se révèle une encyclopédie de l’approximation et de l’erreur policière, cependant, il était déjà interconnecté à un dispositif permettant de tracer l’accès à ses registres. Permettant alors d’identifier pas moins de 610 fonctionnaires ayant interrogé le STIC au sujet de Djamel et 543 au sujet de Johnny. 24 fonctionnaires ayant imprimé la fiche de l’humoriste et 16 celle du chanteur. L’épisode avait entraîné l’ouverture d’une autre procédure, pour violation du secret professionnel, confiée elle à un juge d’instruction.

Qui reçut des explications claires de Philippe Pichon, vite suspecté. Celui-ci expliqua son “geste citoyen” en raison des nombreux dysfonctionnements du STIC, au sujet desquels il avait plusieurs fois alerté sa hiérarchie, en vain. Dans son ordonnance de renvoi, qu’OWNI a pu consulter, le juge écrit d’ailleurs que le fichier :

a été unanimement critiqué et l’est encore notamment par la CNIL qui avait relevé de singulières défaillances et avait émis 11 recommandations (…) Il appartiendra au Tribunal de se prononcer en tant que Juge du fond sur la légalité de l’acte administratif réglementaire ayant présidé à la création du STIC.

Le renvoi de Philippe Pichon devant le Tribunal correctionnel, pour violation du secret professionnel, accès frauduleux à un système automatisé de données et détournement d’informations à caractère personnel, a quant à lui été fixé au 22 mai 1012. C’est là que, par souci de cohérence, les magistrats pourraient se pencher sur la légalité du STIC.

D’ici là, il semble peu probable que le Tribunal administratif prenne le risque, ce jeudi, de confirmer l’expulsion du commandant Pichon. Lequel pourrait bien être traité en héros, au mois de mai, lorsque le débat portera sur le sérieux et la légalité de ce STIC.

Créé en 1994, légalisé en 2001, le STIC a fonctionné en violation de la loi informatique et libertés pendant six ans. Lorsque la CNIL fut enfin autorisée à le contrôler, ses découvertes la conduisirent “à faire procéder dans 25 % des cas à des mises à jour, ou même à la suppression de signalements erronés ou manifestement non justifiés” :

Par exemple, une personne signalée par erreur comme auteur d’un meurtre, ou encore un enfant de 7 ans signalé dans le STIC pour avoir jeté des cailloux sur un véhicule…

En 2008, la CNIL constata un taux record de 83% d’erreurs dans les fiches STIC qu’elle fut amenée à contrôler. Et, au terme d’une enquête approfondie de plus d’un an, la CNIL estima que plus d’un million de personnes, blanchies par la justice, étaient toujours fichées comme suspectes dans le STIC…


Illustration d’Obey via Leo Reynolds/Flickr [cc-by-nc-sa]

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