OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 IPad: premières impressions d’un “early adopter” http://owni.fr/2010/04/08/ipad-premieres-impressions-dun-early-adopter/ http://owni.fr/2010/04/08/ipad-premieres-impressions-dun-early-adopter/#comments Thu, 08 Apr 2010 14:48:28 +0000 Benoit Raphaël http://owni.fr/?p=11856

Applications, et en particulier celles de la presse, prix, équipement, usages…, quels sont les avantages et les inconvénients de la tablette d’Apple ?

Comme certains d’entre vous ont pu le voir sur Twitter, ou sur certaines chaînes de TV (je n’ai pas trouvé les liens vers BFM-TV, si vous avez…, merci RichardTrois pour le lien) et de radio, j’ai eu la chance de pouvoir me rendre à New York le jour du lancement du iPad, avec l’ami Geoffrey La Rocca de RMC.

Je ne vais pas m’étendre sur le déroulé des événements. De nombreux compte-rendus ont déjà été faits. Je retiens simplement l’étonnante capacité qu’ont les Américains de faire du lancement d’un produit un moment de fête.  Mais surtout le professionnalisme d’Apple. Il y avait certes moins de monde que prévu, mais l’excellente organisation a permis d’éviter les bousculades et l’attente (moins de 20 mn pour être servi après l’ouverture des portes). On aime ou on n’aime pas, mais j’ai pris une belle leçon de marketing.

Cliquez ici pour visionner le diaporama
1) Sauveur de la presse écrite ?

Premier constat, après de nombreuses heures de prise en main : l’iPad ne va pas sauver la presse écrite.

L’idée que la sortie d’un e-book allait brutalement changer les usages, c’est-à-dire faire oublier aux lecteurs quinze ans de navigation libre sur le web pour revenir au format traditionnel du magazine dans le même environnement fermé que jadis, était évidemment naïve.

Elle parait encore plus saugrenue une fois que l’on a eu la tablette en main.

Certes, les premières applications presse que j’ai pu tester pourraient être améliorées.
Je passe rapidement sur celle du Monde, simple pdf porté sur e-paper, ridicule et inutile. Celle de Paris Match est dans le même esprit : on reproduit le magazine, à l’identique, sur iPad. Time Magazine fait pire : chaque e-magazine est venu plus de 4 dollars !

La plus réussie jusqu’ici, est l’application du Wall Street Journal. Les éditions du jour sont payantes, mais on peut consulter gratuitement une édition “live”. L’expérience est plutôt agréable. L’appli reprend l’architecture d’un journal traditionnel, ce qui se marie plutôt bien avec le format de la tablette, et remplace généreusement les photos par des vidéos. Ce qui donne la drôle d’impression de se retrouver devant le Daily Prophet, le fameux journal papier de Harry Potter, dont les photos sont animées.

Seul hic : la navigation web avec Safari est très agréable et n’a rien à voir avec celle sur iPhone. Ce qui réduit l’intérêt de l’application. Pour l’instant, il est presque plus intéressant d’aller sur le site du NY Times

… que sur son application iPad.

Pour nous ramener vers leurs applications, les médias devront donc sérieusement travailler leurs interfaces, afin d’offrir une expérience utilisateur vraiment compétitive.
Sans doute devront-ils envisager les applications comme des hors-séries, des packaging “jetables”, plutôt que comme des médias tout en un. Et faire appel à des game designer (les professionnels du jeu vidéo).

À ce titre, l’application d’AP, présentée comme un album photo/vidéo, est déjà beaucoup plus ambitieuse (même si je la trouve assez ratée, par ailleurs).

2) L’avenir des appli média est là :

Parmi la première livraison, les applications média les plus intéressantes étaient les agrégateurs.

- Newsrack, par exemple, se branche sur votre compte Google Reader pour télécharger tous vos flux RSS. L’interface, sans être révolutionnaire, est claire et agréable, avec des outils de partage et la possibilité de “sortir” pour aller sur Internet.

Je peux y lire mes blogs favoris, mais aussi les sections du NY Times et du Monde qui m’intéressent.
C’est devenu la première application que j’ouvre sur mon iPad.

- StumbleUpon : il s’agit de l’application du service du même nom, que vous connaissez peut-être déjà sur Internet. Ce méta-média s’appuie sur ce que partagent les utilisateurs pour proposer une sélection de news, de photos, de vidéos et de billets de blog.

- Early Edition : présente vos flux RSS sous la forme d’un journal dont on tourne les pages.

On le voit bien, si l’ergonomie de l’écran nous ramène au format magazine, cela ne veut pas dire que les médias papier sont avantagés. Rien n’empêche de présenter une sélection de contenus venus de plusieurs médias en ligne et de les présenter dans une interface ergonomique à la manière d’un journal ou d’un livre.

L’iPad est finalement plus une nouvelle façon d’aborder les contenus qu’un e-book au sens où on le comprenait jusqu’ici.

3) Mais à quoi va servir l’iPad ?

L’expérience utilisateur de l’iPad est vraiment incroyable. Les actions sur l’écran tactile sont fluides, agréables, l’expérience est à la fois sensuelle et intellectuelle.
Alors, oui, on peut le voir comme un objet hybride, difficile à situer entre notre smartphone et notre ordinateur portable. On peut le voir comme une gadget de trop.
Mais on peut aussi le voir comme une nouvelle façon d’aborder l’ordinateur, les médias, et le réseau.
Comme l’explique très bien Steven Levy dans Wired, cela fait des années que les interfaces des ordinateurs n’ont pas évolué. Alors que le web a bouleversé nos usages, nous avons conservé notre vieille façon d’utiliser un ordinateur : un clavier, un écran, des logiciels, des fichiers, des prises de connection (USB, HDMI…), des lecteurs de Blue-ray, de DVD venus remplacer le lecteur de disquette…

L’iPad ne va sans doute pas assez loin, on peut penser que la vision de Google du cloud computing (logiciels directement en ligne) et du réseau devrait ringardiser l’écosystème des applications installées sur la tablette. Nous verrons. Mais l’outil nomade tactile révolutionne déjà l’antique ordinateur. C’est une première étape. Et c’est la principale innovation de l’iPad : plus qu’un e-book ou un mini-lecteur de médias, la tablette d’Apple est un “ordinateur” nouvelle génération.

Très léger, nomade (dix heures d’autonomie !), proposant une qualité d’image fantastique, l’iPad me permet certes de télécharger et de consommer des médias (livres, films, photos, jeux…) mais surtout de produire et de partager. Je peux écrire des textes, travailler sur des tableurs ou des présentations, retoucher mes photos, faire ou d’écouter de la musique, dessiner, prendre des notes, partager mes fichiers, régler mes achats…

À ce titre, le clavier tactile est une merveille d’ergonomie. Zéro défaut !
Personnellement, je laisse désormais mon MacBook Pro chez moi et ne me déplace qu’avec mon iPad.

4) Un outil incomplet

Dans cette optique, d’ailleurs, l’iPad est loin d’être parfait. Et même assez frustrant.

- L’écran : il est agréable, certes, mais il se comporte assez mal au soleil. Trop de reflets. Lire un livre en pleine lumière est assez fatiguant. Même dans l’obscurité, l’écran rétro-éclairé abime les yeux, contrairement au Kindle.

- La portabilité des applications iPhone : elle est présentée comme un atout. En fait, vous vous rendre vite compte qu’elle ne présente pas beaucoup d’intérêt. Le clavier devient ridiculement petit, et la résolution est médiocre.

- Pas de multitâches : devoir jongler entre les applis est vite frustrant. C’est un vrai handicap.

- Pas de connection USB : une lacune qui limite l’utilisation de l’objet comme un nouvel ordinateur portable (même si on peut le connecter à un ordinateur). Partager ses fichiers est possible (une fonction d’iTunes vous permet d’importer vos documents Word ou Excel par exemple), mais il est très compliqué de les faire naviguer entre les différentes applis. Encore un handicap qui milite pour le cloud computing.

- Le prix des applications : on tourne en moyenne autour de 9 dollars l’appli. Deux à trois fois plus cher que sur iPhone. Les livres sont assez cher aussi : premier prix à 9,9 dollars. On trouve parfois la version papier pour moins cher !

- L’absence de webcam : frustrant, à l’heure de Chatroulette !

- L’absence de flash : la lecture des sites Internet est sérieusement limitée. Même si de plus en plus de médias abandonnent la technologie Flash pour pouvoir être lus sur iPhone et iPad.
Plus généralement, il y a encore des progrès à faire avec le navigation web. Je n’ai pas pu rédiger mon billet depuis l’iPad par exemple. L’interface de Blogger présente de vrais problèmes de compatibilité.

D’ailleurs, l’ergonomie particulière de l’iPad (tout sur un écran, absence de scrolling vertical, pas de flash, la dimension tactile) va certainement bouleverser la façon dont nous concevrons, demain, nos sites web.

D’ici là, j’attends les prochaines versions. Et les tablettes des concurrents. On verra alors si les 300.000 ventes du week-end se transformeront en raz-de-marée. Et si l’iPad est bien la première étape d’une révolution des usages.

- Pour aller plus loin : je vous conseille la sélection de liens d’AFP Médiawatch.
- Les photos et les captures d’écran sont de moi.

Billet initialement publié sur Demain tous journalistes ?

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“Twitter est une drogue dure pour les journalistes” http://owni.fr/2010/03/16/twitter-est-une-drogue-dure-pour-les-journalistes/ http://owni.fr/2010/03/16/twitter-est-une-drogue-dure-pour-les-journalistes/#comments Tue, 16 Mar 2010 10:33:36 +0000 JCFeraud http://owni.fr/?p=10138 Un rail de tweet ? Photo Foxtongue sur Flickr

Un rail de tweet ? Photo Foxtongue sur Flickr

“Est-ce que bloguer c’est tromper ?” : quand Nicolas Celic, lui-même blogueur et grand utilisateur de Twitter m’a proposé une interview tournant autour de cette question à la Thierry Ardisson, j’ai accepté sans hésiter. L’occasion d’expliquer un peu mon travail de journaliste-blogueur et de faire un bilan après six mois d’expérience tout en évoquant l’impact des nouveaux médias sociaux sur mon métier.

Twitter est en train de nous transformer en véritables junkies de l’info, bloguer c’est de l’esclavage consenti… Morceaux choisis de cet échange initialement publié sur le blog SmallTalk de l’agence 3D Communication.

Quel est l’impact des “nouveaux médias” (blogs, Twitter, agrégateurs etc…) sur vos habitudes de journaliste ?

L’explosion des médias sociaux et l’avènement de l’Internet temps réel c’est avant tout une formidable accélération pour les journalistes : nous sommes soumis à une avalanche d’infos… ou d’intox qu’il faut analyser, hiérarchiser, classer, décider de traiter ou non. Avec Facebook, Twitter, les blogs tout le monde devient producteur ou relais d’informations : notre métier c’est plus que jamais faire le filtre, le médiateur pour raconter la bonne histoire, interagir avec les lecteurs qui risquent de perdre le fil et le sens de l’actualité. L’info sur le Net est terriblement redondante et en même temps, on ne sait plus ou donner de la tête.

Pour exister dans ce flux, le journaliste doit beaucoup plus qu’hier vérifier ce qu’on lui raconte, mieux angler ses papiers, soigner l’écriture, raconter l’histoire qu’on n’a pas vu ailleurs et bien sûr sortir de vraies infos. Avec le numérique qui fait de la presse une sidérurgie 2.0, l’imprimé qui devient peu à peu obsolète, le journalisme doit aussi faire sa révolution. C’est très darwinien : évoluer, intégrer les nouvelles technologies ou mourir…

Twitter : un ami, un concurrent, une perte de temps ?

Une drogue dure ! Un journaliste du “New Yorker” a écrit un papier qui a fait le tour de la blogosphère : “Twitter is like crack for media addicts”. Je confirme. J’ai toujours un œil sur Twitter sur mon PC au journal ou chez moi, sur mon iPhone dans le métro ou au resto, du matin au soir. Mes collègues et ma famille hallucinent. Quand je pars en vacances il me faut bien deux-trois jours pour décrocher ;-) Twitter a fait passer l’info à l’ère du temps réel, c’est sans retour.

Mais avec un peu d’organisation et de recul, on peut s’en faire un formidable allié pour choisir et filtrer ses sources, s’en servir comme d’une vigie. Twitter est devenu presque plus important pour moi que les fils AFP ou Reuters car je sais qui m’alerte et quelle est sa crédibilité. On arrive assez bien à faire le tri entre l’info et la rumeur en 140 signes et il y a des articles ou des billets de blogs que je n’aurais jamais vu sans Twitter. C’est une véritable moissonneuse à liens qui a fait passer la collecte de l’info sur Internet à l’ère industrielle !
Enfin et ce n’est pas rien à l’heure où les vieux médias vacillent, Twitter est aussi un formidable accélérateur pour diffuser ses articles, faire connaître son travail, ou en chercher. Le” journaliste marque” je n’y croyais pas, ça me rebutait culturellement. Mais là encore on y vient, car les lecteurs sont demandeurs : sur Internet, ils suivent des médias mais aussi des journalistes et des blogueurs qui deviennent eux-aussi des micro-médias.

Le blog : “une révélation”

Votre blog : Un choix ? Une contrainte ? Quelle liberté dans sa ligne éditoriale ?

Une révélation. Je fais quelque chose de nouveau tous les trois ans : du quotidien, du magazine, de l’encadrement. Ça m’est tombé dessus tout d’un coup en septembre 2009 : j’avais besoin d’écrire plus freestyle, dépasser le cadre traditionnel du journal et de la rubrique high-tech/médias que je dirige. Sur mon blog, je peux essayer des tas de choses : billets d’humeur, papiers moins économiques et plus sociétaux, reportages, portraits, business stories, chroniques culturelles, débat d’idées… avec une plume forcément plus personnelle et un peu plus déliée. Je suis le metteur en scène de mon info, pour la titraille, l’illustration et surtout je n’ai pas de contrainte de place ! Contrairement à ce qu’on raconte sur Internet, il ne faut pas forcément écrire court pour être lu : il faut essayer d’écrire mieux, raconter une histoire, toucher le lecteur…

Pour ce qui est la liberté éditoriale, je ne me pose pas trop de questions tant que mon info est sérieuse, recoupée, validée. pas de rumeurs bullshit, pas de mise en cause personnelle gratuite…Comme blogueur, je ne travaille pas différemment que quand je suis journaliste aux “Échos”. Mais c’est vrai qu’en tant que citoyen-blogueur, je me permets un peu plus de donner mon avis. De toute façon, l’objectivité journalistique n’existe pas, seule compte l’honnêteté ou ce qui s’en rapproche…

Faut-il être schizophrène pour mener de front une vie de journaliste et un blog ?

Complètement schizo ! Mais j’essaie de cloisonner : à la rédac’ j’ai des responsabilités alors je pense collectif, quand je blogue je joue forcément perso. J’ai l’hémisphère droit qui pense journal et le gauche blog… sans arrière pensées ;-) Je réserve mes infos exclusives aux “Échos” qui m’emploie, et mes humeurs à Mon écran radar. Et j’écris mes billets chez moi tôt le matin avant d’aller travailler, tard le soir ou le week-end dans la mesure où ce blog ne fait pas (encore ?) partie de mes missions au journal…

Quelles sont les réactions au sein de votre rédaction depuis que vous avez lancé ce blog ?

Disons que je passe sans doute pour un drôle d’oiseau car je suis l’un des premiers journalistes à avoir lancé son blog perso aux “Échos”. Un journal, c’est un travail d’équipe mené par une collection d’égos qui se manifestent plus ou moins. Quand quelqu’un sort du rang et devient un peu son propre média, ça peut déranger certains. Mais j’ai eu bien plus d’encouragements que de reproches. Et les journalistes sentent bien aujourd’hui que c’est dans le numérique que ça se passe.

Quel est votre rapport avec vos lecteurs depuis que vous bloguez ?

J’ai enfin trouvé ce contact avec le lecteur que je recherchais depuis vingt ans : les gens réagissent, vous engueulent ou vous félicitent. Il faut répondre, argumenter. Interagir ça aide aussi à apprendre encore, à corriger ses erreurs, à améliorer un billet, à revenir sur l’info…

Ce blog dans cinq ans ? Un jouet cassé, votre activité principale, un joli souvenir ?

Mon activité principale je pense, mais sous une autre forme plus collective : je verrais bien ce blog s’ouvrir, devenir un agrégateur d’infos et de contributions. Sur Mon écran radar pourrait devenir “Sur Notre écran radar”, une sorte de réseau social journalistique que je dirigerai tel un despote éclairé ;-)

Dernière question : de quelle personnalité, vivante ou disparue, contemporaine ou non, aimeriez-vous lire le blog ?

Sans hésitation aucune : Hunter S. Thompson, l’inventeur du “gonzo journalisme”, pour sa plume hallucinée, sauvage et totalement libre. Il utilisait certaines substances pour libérer son écriture mais c’était surtout un rebelle et un poète à la fois dans sa manière de travailler. il se définissait lui-même comme journaliste et hors-la-loi ! Cela a plus de gueule que “forçats de l’info” ou ou “OS du Web” non ? Thompson est surtout connu pour l’adaptation cinématographique de “Fear and Loathing in Las Vegas” (Las Vegas Parano) mais il a écrit des textes formidables plus proches du roman journalistique que du journalisme à la chaîne que l’on connaît aujourd’hui. Il est mort en 2005 mais je rêverai de savoir ce qu’il penserait de notre époque et de son actualité.

> Billet initialement publié sur Mon écran radar

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